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7 janvier 2013 1 07 /01 /janvier /2013 17:20

      Jean PARFONRY1 devait avoir à peine entamé ses études de médecine quant la première guerre mondiale démarra. Agé de 19 ans, il avait probablement été mobilisé comme de nombreux autres. La mobilisation générale qui avait accompagné la déclaration de guerre à l'Allemagne avait rassemblé plusieurs millions de personnes. On ne disposait pas toutefois d'informations sur ce qui fut son parcours. La persévérance a une nouvelle fois apporté son lot de documents inédits.

      Les deux extraits repris ci-dessous permettent de confirmer la participation de Jean PARFONRY, mais aussi de le consolider par des éléments complémentaires.

Le Temps, 24 octobre 1915

p. 3 : Citations à l'ordre de l'armée : Le Journal Officiel publie les citations à l'ordre du jour des militaires dont les noms suivent :

Marcel Durand, médecin auxilliaire......... ; Violet, maréchal des logis......... ; Grandchamp de Cueille, sous-lieutenant.......... ; Goursolas, médecin-major de 2è classe........... ; Parfonry, infirmier : a montré un dévouement et un courage remarquables en allant volontairement, jour et nuit, relever et panser les blessés sous le feu de l'ennemi ;.

Artillerie de la Division marocaine, 276è régiment d'artillerie crapouillots2 parc 8/112, Préface du Colonel Maloigne, Librairie militaire Chapelot, Paris

p. 25 : A la suite des opérations de Champagne, et comme récompense à son héroïque conduite depuis le début de la campagne, le groupe de l'artillerie de campagne de la division recevait leur première citation à l'ordre de l'armée. Le 26 octobre, la D.M. est passée en revue avec le 2ème corps de l'armée coloniale par le Roi d'Angleterre et le Président de la République.

dans la Liste des Officiers ayant appartenu à l'artillerie de campagne de la division marocaine, 1914-1918 , on y repère p. 82 : Parfoury : Médecin, aide-major

      L'erreur d'écriture est une nouvelle fois manifeste3. Sans aucune hésitation, on fait la relation avec Jean PARFONRY. Selon les quelques indications qui lui sont relatées, il a donc du être intégré au 276ème Régiment d'Artillerie de la Division Marocaine, l'une des rares troupes qui furent envoyées du Maroc par le général LYAUTEY, dès le début de la guerre. Celui-ci, il est vrai, hésitait à se dégarnir de soldats qui allaient lui servir pour lutter contre les rébellions des tribus du Rif. Ces troupes furent opérationnelles dès le 23 août 1914 à Cons-la-Granville (Meurthe et Moselle). Elles se replieront progressivement au fur et à mesure des lignes de combat et de l'avancée des allemands. On les retrouvera ainsi successivement près de la frontière belge (Thin-le-Moustier), puis dans les Ardennes (Rethel, Seuil, Juniville) avant de bifurquer vers l'Artois puis la Somme, pour remonter par la suite sur Verdun. Au final, elles compteront la perte au combat de 30 officiers et de 425 artilleurs.

      Rien ne peut témoigner d'un engagement de Jean PARFONRY dès les premières heures. Sa citation à l'ordre de l'armée en octobre 1915, dans le Journal Officiel, est néanmoins confirmée par un second document relatant au jour le jour les combats menés par la Division marocaine tout au long de cette guerre. Il y est effectivement mentionné de la citation à l'ordre de l'armée pour le groupe de l'artillerie de campagne de cette Division marocaine (A.C./D.M.) dont Jean faisait partie. Si dans le document officiel, il est décrit comme infirmier, il est repris en tant que médecin dans le document reprenant la chronologie des faits militaires. On peut penser que ce second document, dont la publication est autorisée par le Ministère de la Guerre, n'est pas basé spécifiquement sur une attestation officielle de diplôme, ce qui doit être plus précisément le cas d'un texte publié au Journal Officiel. Dans le document de l'Etat-Major des Armées, il est catalogué en tant qu'aide-major, un des grades inférieurs qui étaient déclinés pour désigner les médecins4.

      Et plus que probablement, qu'il a été fait appel à cette catégorie d'étudiants, vu le nombre de victimes enregistrées dès les premières échauffourées. Car rien que dans le régiment de la Division marocaine auquel devait faire partie Jean PARFONRY, on y recense une vingtaine de médecin - aide major. Un seul y perdra la vie (DIGONNET) et sous réserve d'autres vérifications, Jean PARFONRY fut le seul d'entre eux à être cité. La même forme de recrutement a existé pour les vétérinaires. Cela en rapport à l'énorme effort engagé dans la mobilisation des équidés pour assurer le transport au début de la guerre. Rapidement cependant, les régiments de cavalerie s'avérèrent inefficaces contre la nouvelle puissance de feu dégagée par l'artillerie et les chars d'assaut.

      Il est fort probable qu'il a dès lors fait partie des soldats qui ont été passés en revue le 26 octobre 1915 par le roi d'Angleterre Georges V et le Président de la République Raymond POINCARE, venus rendre le moral aux troupes. On ne peut dire, à ce stade, à quel moment  Jean PARFONRY sera démobilisé pour lui permettre de poursuivre ses études.

      Et pour relater les vélléités rencontrées par cette artillerie de campagne de la Division marocaine, tout comme cela avait été procédé pour témoigner du passage du Rhin en mars 1945 par Jacques PARFONRY, son neveu et filleul  (voir article : La seconde vie de Jacques après Germersheim) , on reprend quelques extraits du document relatant l'épopée probable de Jean PARFONRY durant la première partie de ce premier conflit mondial. D'août 1914 à juillet 1916, l'A.C./D.M. combattra à la frontière belge, puis dans le secteur de Reims, en Artois avant de revenir en Champagne pour se retirer ensuite sur la Somme.  Rien de concret ne permet de l'insérer dans les combattants qui ont survécu à l'hécatombe de Verdun et du Chemin des Dames.

     Ce conflit ne résolvera malheureusement pas, une fois de plus, le partage alambiqué du territoire de la Basse et Haute-Lotharingie, issu de l'Empire de Charlemagne. Il faudra, une vingtaine d'années plus tard, renouveler l'expérience, avec cette fois l'apparition d'autres sentiments que purement militaires et territoriaux.

p. 16 : Le 9 juin, dès la première heure, l'intensité du tir ininterrompu pendant la nuit s'est accrue. La zone arrière ennemie disparait dans la poussière et la fumée des éclatements des 155 et des 220.... A 9h 45, le tir a pris toute sa vitesse, le ciel s'est complètement éclairci, et sous le soleil éclatant, brillent tout le long du parallèle de départ, les baïonnettes de l'infanterie prête à bondir. A 10 heurs, cette ligne étincelante s'anime et s'avance...;

p.17 : Dès le 11 juin, l'artillerie allemande déploie une activité de plus en plus intense. Le Boche, incapable de reprendre le terrain perdu, déverse sur les tranchées, les observatoires et la plaine de Berthonval, des tonnes de projectile. Les pertes sont sérieuses.

p.18 : Du 26 au 28 juin, la relève s'effectue et l'artillerie rejoint son infanterie dans la région d'Auxi-le-Chateau.....mais les pertes de l'artillerie nécessitaient une reconstitution des batteries et les fatigues de deux mois de tirs ininterrompus, de nuit et de jour, imposait un repos. Il fut largement accordé ;

p.20 : Le 25 septembre, à 9h 15, l'infanterie, depuis longtemps impatiente, s'élance à l'assaut..... le 4ème tirailleurs réduit brillamment la résistance acharnée des Boches dans les organisations formidables du bois Sabot ; les coloniaux ont franchi la cote 171 et marchent sur Navarin ;

p. 23 : Le 29 septembre,......, l'attaque du front est décidée, s'exécute le même jour et échoue devant des réseaux inconnus et intacts ;

p. 23 : Le 6 octobre, les reconnaissances d'infanterie, subissant de fortes pertes, constataient la solidité du front ennemi, l'attaque étant définitivement ajournée ;

 

     Au final, on en retient que Jacques, au cours du second conflit mondial (lire article : La seconde vie de Jacques après  Germersheim), aura été dans le même engagement  que son oncle et parrain Jean lors du premier conflit. Les deux personnages auront apportés leur contribution personnelle pour défendre leurs idéaux. Et on pourrait trouver finalement l'explication du choix de l'engagement de Jacques dans une division marocaine, comme pour rechercher une certaine cohérence avec celui de son parrain Jean dans une unité de même origine. Il faut très peu croire au hasard quand on trouve de pareilles similitudes. Une continuité qui s'inscrit dès lors sur la carte de visite de la famille reprenant déjà la liste des résistants qui y ont parfois donné de leur vie (voir article : Et si on parlait de nos Résistants) 

 

1 Jean PARFONRY est l'un des deux petits-fils du marbrier François-Xavier PARFONRY ;

2 Crapouillot : dans le langage des combattants de la première guerre (les poilus), ce terme est attribué aux mortiers de tranchée servant à lancer des pièces d'artillerie ;

3 Il a également été vérifié qu'aucun rapprochement ne pouvait exister avec une personne portant le nom de famille PARFOURU ; aucun soldat de ce nom n'a été recensé pour la période de la première guerre mondiale ;

4 L'appellation Médecin-major a été utilisée jusqu'en 1928 pour désigner les médecins militaires comprenant plusieurs grades (major de première classe, major de seconde classe, aide-major, sous-aide-major) ;

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6 janvier 2013 7 06 /01 /janvier /2013 10:39

     Découverte dans un article d'un journal publié en 1880, on y lit une nouvelle mention de notre désormais célèbre marbrier, qui devient en quelque sorte la figure de proue, le leader incontesté de notre patronyme.

Beaumarchais. Journal satirique, littéraire et financier, 23 octobre 1880

A travers l'Union Centrale1

.Les expositions périodiques ont généralement peu de succès. Cependant celles de l'Union Centrale font exception. Il y a pour les curieux des curiosités, pour les délicats un plaisir toujours nouveau à constater les efforts de nos fabricants parisiens, de vrais artistes qui ont exporté à Vienne2 notre première revanche........ Parfonry n'a envoyé qu'une cheminée; c'est peu pour celui qui peut dire avec Puget : Le marbre tremble devant moi.

             signé : E.A. Spoll

      Mais qui est ce PUGET qui est relaté dans l'article. A l'évocation de ce nom, chacun d'entre nous fera implicitement le lien avec la marque sur les bouteilles d'huile d'olive qui achalandent les rayons de n'importe quel magasin offrant des produits agro-alimentaires de nos jours. D'autant que la fabrication de ce produit, au départ conditionné en bidons de 5 litres sur le Vieux Port de Marseille, a démarré en 1857, à l'initiative d'Adolphe PUGET. Malgré la cohérence dans les dates, rien ne permet de relier ce produit composé à majorité d'acides gras mono-insaturés, au marbre, roche métamorphique à granules de calcaire, si cher à notre dévoué aïeul. Même si l'acteur Fernandel allait exploiter ce filon publicitaire, au travers de ses films, on comprenait mal que François-Xavier se soit mis à voyager sur le même registre. Il y a avait un antagonisme, un rejet, une réaction chimique inappropriée, ne fut-ce qu'au niveau du pH des deux produits. On se devait de trouver une autre explication à cette phrase du journal qui semblait avoir été extraite d'une tirade d'une tragédie grecque. Quel pouvait bien en être l'origine ?

      Un autre PUGET était à découvrir. Il se dévoilait finalement sous le nom de Pierre PUGET (1620-1694), né et décédé à Marseille comme le précédent. Et cette fois, on tenait le bon filon dans le marbre...de Carrare. Manifestement, un peu oublié de nos jours, Pierre PUGET fait partie de ce qu'on peut appeler " le panthéon des sculpteurs français ". Son éloge est détaillée dans un article que chacun pourra aisément trouver sur Wikipédia. On n'en retiendra ici que quelques aspects. Son oeuvre est toujours présente de nos jours dans les rues et musées de Marseille, de Toulon (les Atlantes), de Gènes, de Rouen, au château de Vaux-le-Vicomte, au Musée du Louvres (une salle y porte son nom), .... Célébré comme le "Michel-Ange de la France" durant les XVIIIème et  XIXème siècles, sa création la plus connue est le célèbre "Milon de Crotone ", au Musée du Louvres.

     PUGET est aussi celui qui a excellé pour y faire exulter l'allégorie dans le marbre. Reconnu pour avoir montré pour le marbre " une admiration sensuelle et quasi amoureuse ", sa perfection artistique s'est transmise à travers plusieurs de ses citations :

                      " La pièce de marbre est sans défaut et blanche comme neige "  mais surtout

                " Le marbre tremble devant moi, si grande que soit la pièce "

    Voilà retrouvée l'origine de la singulière phrase reprise en partie par le chroniqueur Edouard-Auguste SPOLL dans l'article d'un journal en 1880. Elle avait été écrite en 1683, deux siècles plus tôt, par Pierre PUGET, considéré comme étant de ceux ayant introduit l'art baroque en France. Les pièces de marbre présentées par François-Xavier PARFONRY laissaient ressortir la même impression de maitrise de l'art, de la composition, de l'équilibre géométrique, bref de la beauté dans ce qu'elle peut avoir de tragique au niveau de sa représentation.

      Celui qui avait osé faire cette comparaison  est le chroniqueur Edouard-Auguste SPOLL, né en 1833. Ce personnage, à la fois journaliste, écrivain, traducteur, d'une grande culture littéraire, a travaillé en tant que rédacteur en chef pour L'Express, après avoir été collaborateur pour Le Télégraphe et La Lanterne. Il était aussi le traducteur officiel de l'écrivain américain Nathaniel HAWTHORNE (1804-1864).

      Dans cette seconde moitié du XIXème siècle, marquée par les idées nouvelles, la référence faite au sculpteur PUGET par un esthète de l'écriture,  n'en est que plus explicite. Elle en soulignait la qualité des réalisations de François-Xavier. Cette dernière comparaison avec un sculpteur hors catégorie, s'ajoutant à toutes celles déjà retrouvées, ne fait que confirmer la valeur de ce marbrier d'art.  Son travail se faisait indéniablement dans la continuité, en y affirmant une maitrise des lignes, des compositions et des sujets. Mais sans aucun doute et surtout dans l'art de travailler, avec infiniment de précision, un matériau aussi dense, aussi fragile et aussi précieux, en particulier quand il provient de Carrare où de .. Mazy.

      Reste pour les généalogistes confirmés à trouver un quelconque lien de parenté entre le sculpteur Pierre PUGET et l'industriel Adolphe PUGET, tous deux de Marseille. Ce qui présente un caractère assez secondaire au niveau de cet article.  

 

1 Il s'agit de l'Exposition "Union Centrale des Beaux-Arts appliqués à l'industrie " chargée de promouvoir en France la culture artistique, assurant le lien entre la beauté et l'utilitaire ;

2 On fait référence à l'Exposition Universelle de Vienne de 1873 qui avait marqué le renouveau de l'industrie française après la crise de la fin du second Empire ; François-Xavier PARFONRY y avait obtenu sa première médaille internationale ;

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30 décembre 2012 7 30 /12 /décembre /2012 09:45

    Pour preuve de la mobilité affichée par les personnes portant notre patronyme, une mention d'une présence au Maroc est désormais attestée en 1910. Bien avant mon arrivée dans ce pays en 1975, un autre PARFONRY avait déjà foulé le sol marocain pour y travailler. C'est ce qui découle du petit entrefilet d'article retrouvé dans un journal espagnol de cette époque. Des nouvelles en provenance de Melilla, l'une des deux enclaves espagnoles sur le sol africain de nos jours, nous parviennent.

                           La Correspondienca de Espana, Madrid, 10 de Marzo de 1910

                           Desde Melilla

                           El teléfono de las minas

                           Con éxito excelente ha sido inaugurada hoy

                           la linea telefonica instalada entre las minas

                           espanolas de Beni-bu-Ifrur y las oficinas que

                           tiene la Compania en este plaza.

                           Las estaciones intermedias han sido instaladas

                           por el ingeniero Sr. Parfonry

                           Los nuevos fortinos.

                                    Adelantan mucho los trabajos de construccion

                           de tres fortines en los alrededores de las

                           minas de Beni-bu-Ifrur.

                           Seran la capaces para 160, So y 20 hombres,

                           respectivamente   .

 

    Sur le plan de l'identification de cette personne, il ne peut sans conteste s'agir que de Joseph (José) PARFONRY, celui qui est déjà connu pour avoir installé des paratonnerres sur de nombreuses églises d'Andalousie à la fin du XIXème siècle. L'année et le lien avec l'Espagne en sont les preuves (voir articles :  Joseph Parfonry, le fournisseur de paratonnerres à Séville; José Parfonry de Hotton). Après y avoir grimpé sur la plupart des clochers, notre émigré belge a senti probablement le besoin de se reconvertir, sinon d'étendre son activité à d'autres opportunités économiques naissantes. Le développement du téléphone et la colonisation espagnole au Maroc, pays voisin, lui ouvraient d'autres créneaux. C'est ce qui se réflète des quelques lignes repérées dans un journal espagnol.

      L'aspect généalogique de ces quelques lignes n'est pas le seul intérêt des commentaires qui en sont retirés. Malgré la brieveté, elles sont assez explicites pour nous permettre de relater une période particulière de l'histoire de la colonisation du Maroc. Pour simple rappel géographique bien nécessaire, son territoire a été divisé par les deux puissances coloniales qu'étaient la France et l'Espagne. Ce dernier pays occupait une bande de terre au nord, large de quelques dizaines de km, s'étendant entre la vallée du Loukkos, du côté Atlantique, jusque la vallée de la Moulouya à l'est, laissant à la France la petite bande d'Oudja (comprenant Oujda, Berkane, Saidia, La Plaine des Triffas, Ahfir, Madagh, Cafe Maure), frontalière avec l'Algérie, ainsi que tout le sud du pays1.

     La mention dans l'article des mines de Beni-bu-Ifrur2, combinée à l'année 1910, atteste que l'on se situe peu après l'épopée de Bou Hamara, le sultan auto-proclamé pour la région Nord et Est du Maroc, soit un territoire assez important allant de Fès à Mélilla, à cheval sur les parties française et espagnole. Ce dernier, mécontent de la position des précédents sultans officiels, jugés trop aux ordres de la France, avait réussi à rallier quelques tribus du Rif. Après avoir battu  les troupes du sultan Moulay Abd al Aziz, il  prenant le titre de Sultan de Taza dès 1902. Il s'allia les bonnes grâces des autorités françaises et surtout espagnoles qui voyaient en lui un usurpateur, pouvant les aider si besoin à contrer les véléités d'un sultan qu'ils avaient néanmoins reconnus.

     Bou Hamara, ne résista pas cependant à l'attrait des sirènes. En juillet 1907, il  octroya entr'autre3 l'exploitation des mines de Beni-bu-Ifrur, le plus riche gisement de fer du Maroc, à la Compania Espanola de Minas del Rif (CEMR) ainsi que l'autorisation de construire une ligne de chemin de fer entre le site de la mine et le port de Melilla, soit quelques 20 km passant au beau milieu du territoire de la tribu des Beni-bu-Ifrur. C'est de cette ligne de chemin de fer que l'on relate dans l'article du journal, au détour de l'installation de la ligne téléphonique inaugurée en 1910. Cet accord sonnait l'halali de Bou Hamara, considéré dès ce moment comme un traître et abandonné par plusieurs chefs de tribus. La situation se mettait à changer. Peu de temps après, alors qu'ils travaillaient à la construction du chemin de fer entre Beni-bu-Ifrur4 et Mélilla, des ouvriers espagnols furent attaqués et tués. Bien que la réaction espagnole fut importante, par l'envoi de 17 000 hommes, elle se solda finalement par plusieurs défaites, en particulier celle du Desastre del Barranco del Lobo5 le 9 juillet 1909. Les espagnols compteront au cours de cette période plus d'un millier de morts dont leur général commandant6. Quant à Bou Hamara, il sera pris en otage le 8 août 1909 après avoir été battu par l'armée du sultan Moulay Abd al Hafid7, cette fois aidée par la France. Il sera exécuté le 2 septembre, par décision du sultan.

    Les tribus rifaines continueront à inquiéter les armées d'occupations jusqu'en 1912. Cette période, dénommée par les historiens comme la Seconde guerre de Mélilla8 (1909-1912), marquera les préliminaires de la Guerre du Rif  qui se développera par la suite sous l'impulsion d'un autre chef rifain, Mohammed ben Abdelkrim el Khattabi (1882-1963, Le Caire).

     Il est manifeste que la stabilité n'était pas encore assurée lorsque Joseph PARFONRY est arrivé dans la région de Mélilla pour effectuer son travail. De  nombreux combats se sont encore déroulés dans les environs. Mais l'armée espagnole, par l'envoi de plusieurs milliers de réservistes, et la construction de ces nombreux fortins le long de la ligne de chemin de fer, en assurait la protection. Le fait de signaler son nom dans les quelques lignes de l'article du journal est manifestement une preuve que son rôle n'était pas des plus mineurs. Qu'y faisait-il précisément ? Du travail de construction ou d'installation électrique ? De là, l'intérêt d'espérer pouvoir disposer, au sein de sa descendance, d'éléments de souvenirs sur son travail dans cette région du Maroc.

    Comme pour en rechercher une quelconque continuité, durant la première période de mon travail au Maroc, à l'Office Régional de Mise en Valeur Agricole de la Moulouya, entre avril 1975 et octobre 1976 (voir article : Conséquence d'un attentat au Maroc !) , j'ai arpenté cette région de la tribu des Beni-bu-Ifrur, en circulant aux environs de cette colline remplie de minerais de fer. Sans avoir un seul moment imaginé que je marchais sur les pas qu'un autre Parfonry avait effectué quelque 65 ans plus tôt. L'extraction du fer se faisait au ralenti depuis quelques années déjà. Les plaines autour de cette colline étaient désormais apaisées. Les aménagements hydro-agricoles qui suivront y auront apporté un nouveau partage de la terre et l'eau pour les cultures. Les canaux et les séguias d'irrigation remplacent l'extraction bruyante et polluante du minerai de fer. Que ce soit dans celle du Bou Areg, dans celle du Garet, ainsi qu'autour de Selouane, on cultive dans ces plaines désormais de la canne à sucre, de la betterave, du maraîchage. Et par ci par là, on y découvre encore des vestiges de ces castillos9 ayant servi à abriter une vingtaine de soldats espagnols, assurant la sécurité des lieux. De nos jours, les pentes des collines du massif ferreux de Beni-bu-Ifrur sont prises d'assaut par les cyclistes et par les quads10.

 

1 Sur le plan historique, cette répartition agréait la Grande-Bretagne en évitant de devoir concéder à la France la rive Sud du Détroit opposée à son territoire de Gibraltar ;

2 Beni-bu-Ifrur : nom d'une des 66 tribus occupant le territoire sous Protectorat espagnol, occupant une région de 169 km2 du Sud de Selouane jusqu'à la Plaine du Gared ; le massif des Beni-bu-Ifrur s'élève sur une colline dont le sommet Monte Uixan se trouve à plus de 600 mètres d'altitude ;

3 Il octroya également l'exploitation de la mine de plomb du mont Afra à la Compagnie franco-espagnole du Nord de l'Afrique ;

4 Sur la carte Michelin 2010  Maroc 1:1 000 000, Beni-bu-Ifrur s'écrit Beni-Bouyafrour ; situé juste en-dessous de la localité de Segangane ;

5 En français : Catastrophe du ravin du loup ; Nom de la première bataille menée par les tribus rifaines sous le commandement de Shérif Mohammed Ameziane ;

6 Considérée comme la plus importante défaite espagnole en Afrique, elle sera suivie de  la " Semaine tragique "  à Barcelone (26 juillet au 2 août 1909), au cours de laquelle l'armée tirera sur les manifestants ;

7 Périodes successives de règne des Sultans du Maroc : Hassan 1er : 1873-1894 ; Moulay Abd al Aziz : 1894-1908 ; Moulay Abd al Hafid : 1908-1912; Moulay Youssef : 1912-1927 ;

8 Première guerre de Mélilla : 1893 -1894 ;

9 Castillos est plus usité de nos jours que le terme Fortines utilisé dans le journal en 1910 ( voir sur Google earth : Photo du Castillo de Ouiza : 35°07'08'' N et 3°00'44'' E);

10 Sur Google Earth, on peut voir quelques photos récentes du site des anciennes mine de fer des Beni-bu-Ifrur, permettant de compléter les informations de cet article (coordonnées : au sud de Segangan 35°06'50'' N et 3°00'30" E ) ;

   

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 12:07

     Durant sa longue carrière de marbrier d'art, François-Xavier PARFONRY a collaboré avec différents partenaires. Les derniers furent les frères HUVE avec lesquels il s'associa vers 1877, peu après s'être séparé de LEMAIRE1, fort probablement pour raison d'âge avancé de ce dernier.

     De cette famille HUVE, on en avait appris bien peu de choses, sinon de nous permettre certaines suppositions. On pouvait ainsi envisager que ce nom avait un lien avec la famille de Félix HUVE (1816 - 1887), Ingénieur civil, Maire de Sablé-sur-Sarthe, dont la commune connut un important développement dans le courant du XIXème siècle, en rapport justement avec la production de marbre. Son grand-père Jean-Jacques HUVE (1742, Boinvillers - 1808, Versailles) et son père Jean-Jacques Marie HUVE (1783, Versailles - 1852, Paris) sont connus pour avoir été de grands architectes parisiens. François-Xavier fait par ailleurs référence à cette commune de Sablé-sur-Sarthe quand il répond en 1882 à l'une des questions de la Commission d'enquête sur la situation des ouvriers et des industries d’art en mentionnant "A Sablé, il existe une excellente maison qui fait de la petite marbrerie, ses ouvriers sont très bien tenus". Preuve s'il en est qu'il avait certains contacts dans cette commune. La composition de cette famille HUVE, très nombreuse par ailleurs, au regard des sites de généalogie, ne nous permettait pas toutefois de faire le lien, du fait qu'on ne possédait pas le prénom des frères HUVE, les associés de François-Xavier PARFONRY.

     C'était sans compter sur la persévérance, la perspicacité, la patience, l'opiniâtreté du " poor lonesome cowboy ". Ainsi, en poursuivant cette recherche, basée sur des erreurs d'écriture, l'existence d'un dénommé Lucien HUVE (1856-1926, Paris) fut découvert, mentionné, en 1897, comme responsable d'une marbrerie, anciennement dénommée PARFOURY et HUVE frères2. L'erreur d'écriture en avait retardé l'apparition de cette information.  Le lien avec la famille HUVE de Sablé-sur-Sarthe n'était plus qu'une question de temps. Le chemin, à travers les sites de généalogie, allait permettre de clarifier rapidement les choses3. Ce Lucien était bel et bien le neveu de Félix HUVE. Ingénieur des Arts-et-Manufactures4, tout comme son frère Albert, il perpétuait la lignée de ses ancêtres. Il fut en outre fait Officier des Palmes Académiques et de l'Instruction Publique. Et découverte inédite, cette date de 1897 est une preuve en soi comme quoi François-Xavier s'était retiré de l'entreprise avant son décès survenu en juillet 1898. La marbrerie avait ainsi été reprise par Lucien HUVE, du vivant de François-Xavier. Quant à son frère, Albert HUVE (1860-1912, Meudon), on relatera, en tant qu'indice éventuellement exploitable ultérieurement, qu'il se mariera à Milan en 1903 avec Ines CASATI5.

     Cette découverte du prénom permet de réaliser une avancée importante dans nos recherches. Parmi les références généalogiques de ce Lucien HUVE, on en extirpe les données relatives à son mariage le 21 juillet 1891, à l'âge de 35 ans. Avec un nom de l'épouse et un lieu du mariage particulièrement évocateurs quand on connait le parcours de François-Xavier PARFONRY. La mariée se dénomme Cécile DEJAIFFE et le lieu se trouve en Belgique, dans la localité de Mazy précisément. Albert HUVE, son frère, et Henri CRET, son beau-frère, étaient les deux témoins du marié6. Les deux noms de DEJAIFFE et Mazy se mirent à scintiller dans nos yeux car ils ouvraient, par leur combinaison, la porte à de nouvelles pistes. En voici l'explication. 

      Il était acquis, par un extrait découvert auparavent que, parmi ses différentes sources d'approvisionnement en marbre, François-Xavier utilisait dès 1867, avec son premier associé DUPUIS, le marbre noir de Belgique7, calcaire de haute valeur.

LAURANT-LAPP (J) : L'exposition universelle de 1867 illustrée

p. 158 : MM. Dupuis et Parfonry ont exécuté diverses cheminées avec beaucoup de bonheur. Deux, entre autres, se font remarquer : l’une en marbre noir de Belgique, style Renaissance ; l’autre en marbre rouge antique des Pyrénées, style Louis XIII

 

     Et parmi l'éventail disponible de ces marbres noirs belges, il y avait celui de Golzinnes, extrait justement dans la localité de ....Mazy. Et, si on y ajoute que l'une des trois marbreries de cette localité8 était exploitée par la famille .....DEJAIFFE, on ne peut qu'y trouver l'indice, le déclencheur de neurones, la  parfaite preuve qu'affectionnent de trouver tout historien de la mémoire familiale. DEJAIFFE et Mazy assurément faisaient parties du cercle de connaissances de François-Xavier PARFONRY. En voici quelques explications complémentaires pour nous en assurer.

     Cécile DEJAIFFE (1860, Saint-Martin - 1946, Bruxelles) est de fait la fille de Télesphore DEJAIFFE (1817, Saint-Martin9-1879, Mazy), maître-carrier, le fondateur de cette carrière de marbre, créée en 186610. C'est le frère de Cécile11, Octave Marius DEJAIFFE (1861, Saint-Martin-1945, Mazy), puis les fils de ce dernier, Charles (1905, Mazy-1969, Jolimont) et Albert (1902, Mazy-1981, Uccle) qui précisément développeront cette marbrerie, y portant le titre de Président des Carrières et Usines Dejaiffe

      Le couple HUVE-DEJAIFFE eut une fille Anne-Marie HUVE, née à Paris en 1893, ce qui apparait logique, tout comme son mariage à Paris, le 2 juillet 1919, avec un dénommé Wilmart DEBATTY (1893, Saint-Ghislain-1966, Menton), qualifié d'Officier et de nationalité belge. Le plus surprenant par contre est le lieu de son décès. Anne-Marie est décédée en 1977 à Dilbeek12 en Belgique. Anne-Marie HUVE serait donc revenue en Belgique, ce qui ne fut pas le cas de la descendance de François-Xavier. Quelles affinités avait-elle conservées avec son pays ? Est-elle venue rejoindre à un moment sa mère décédée à Bruxelles ? A t-elle été habité auprès de l'un de ses sept enfants, après le décès de son époux ?

     Pour être complet, on ajoute à tous ces éléments, un dernier lien qui pourrait s'avérer être au final un indice intéressant confortant, à cette étape des recherches, la synthèse ci-après. Jules Marie DEJAIFFE, un autre frère de Cécile, est devenu en 1890, par mariage avec Alexandrine de ROMEREE de VICHENET, le beau-frère du Comte de BEAUFFORT(1862-1937), propriétaire du château de Mielmont, situé sur la localité de Spy, village proche de Mazy. C'est déjà ce personnage qui nous était apparu précédemment en organisant l'accueil à Spy de différentes communautés religieuses françaises au début du XXème siècle (voir article : Les communautés religieuses à Spy).

     De ce mariage à Mazy du couple HUVE - DEJAIFFE, on en retient qu'il devait avoir des relations commerciales soutenues entre les deux marbreries PARFONRY-HUVE et DEJAIFFE. La qualité du marbre noir répondait aux sollicitations des riches clients de l'entreprise parisienne. Et François-Xavier a sans aucun doute été parmi les premiers clients chez DEJAIFFE. Son intéret pour le marbre noir de Belgique, lors de l'Exposition Universelle de 1867, apparait à peine un an après la création en Belgique de cette marbrerie. Il en est découlé très certainement de nombreux voyages de François-Xavier sur la Belgique et en particulier vers Mazy. Où y logeait-il ? Probablement dans une des nombreuses demeures aristocratiques qui se trouvaient dans les environs, en particulier dans le village voisin de Spy. Château de Mielmont, Château Cheniot, Château Leurquin, Château de Mme Reumont,... Le choix ne manque pas ! Ce qui pourrait dès lors s'avérer être l''une des raisons de la présence, quelques années plus tard, de nombreuses confréries religieuses françaises13, venues s'installer dans ces demeures, avec l'appui de Fernand, Amédée, Charles, Comte de BEAUFFORT, au début du XXème siècle. Le vote de la loi COMBES, votée à Paris, reconnaissant la séparation de l'Eglise et de l'Etat avait échaudé pas mal de congrégations qui y voyaient une atteinte à leur monopole. Paul, le fils de François-Xavier, par les contacts établis précédemment par son père dans la région de Spy-Mazy, aurait en quelque sorte servi d'entremetteur pour aider les confréries religieuses à fuir l'ambiance de laicité comme de nos jours de nombreux français fuient l'ambiance taxatoire de leur pays. Et sans oublier la présence de la peinture religieuse, copie d'un RUBENS, de ce même Paul PARFONRY, trouvée dans l'église Saint Amand de Spy (voir article : Signature authentifiée à Spy).  Comme une sorte d'ex voto apporté en remerciement de l'appui reçu. Manifestement, le lien, si ténu au début de nos recherches, avec le marbre noir de Mazy et la commune de Spy proche, semble s'être fortement reserré.

     L'image de l'encadré Carrières DEJAIFFE, fortement altéré par le temps, sur un mur d'une usine à l'abandon, me revient désormais à mon souvenir. Pendant plusieurs années, que ce soit au cours de mes études universitaires à la Fac de Gembloux ou par la suite pendant mes années de travail à Bruxelles, je l'ai aperçu de la banquette du train qui, serpentant dans la vallée de l'Orneau, faisait la liaison Gembloux - Jemeppe-s/Sambre en passant par Mazy. Sans me douter un instant que j'avais, devant moi,  l'une des clefs pour comprendre l'histoire de la saga des PARFONRY de Neerheylissem. L'horloge du  temps devait cependant avancer de quelques années. Il était encore trop tôt.

    Depuis le décès d'Albert DEJAIFFE en 1981, la carrière n'appartient plus à cette famille. Son dernier repreneur, depuis 1996, est la S.A Nouvelles Carrières et Marbreries de Mazy.

1 Ce dernier devait être probablement le sculpteur Philippe-Henri LEMAIRE (1798-1880) ;

2 Bulletin de la bibliothèque de la Chambre de Commerce de Paris, 23 octobre 1897, n° 40-43 (p. 1083) ;

3 Plusieurs sites Généanet (Astrid de Nedde, Chantal Fonteyn, Philippe Gérard) ;

4 De nos jours : Ecole Centrale de Paris , formant des Ingénieurs centraliens ;

5 Il existe une rue Felice CASATI à Milan ; Possibilité éventuelle d'avoir un lien avec les marbres de Carrare ;

6 L'extrait d'acte de mariage m'a été transmis par Philippe JOSIS du " Groupe Gembloux généalogie " ;   

7 Marbre noir de Belgique : extrait depuis l'Antiquité à Mazy, Dinant et Dénée ; caractérisé par l'uniformité de sa couleur sans tâches ni veines, très utilisé aux 18ème et 19ème siècles, celui de Golzinnes (Mazy), malgré des prix très élevés, était spécialement destiné pour la fabrication de cheminées, pendules et statues ; le marbre noir de Dinant était choisi de préférence pour de grands ouvrages d'église ;

8 Les familles DEJAIFFE, ETIENNE et DUBAY ;

9 Saint-Martin est un village situé à côté de Mazy ;

10 La première exploitation souterraine de marbre noir à Mazy aurait commencé peu avant, vers 1850, avec la marbrerie de Joseph ETIENNE (1827-1895) ;

11 Un autre frère, Jules Marie DEJAIFFE (1853, St Martin-1918, Mazy) fut bourgmestre de Mazy et administrateur de la Société des Glaces d'Auvelais ;

12 Dilbeek : commune située en périphérie de Bruxelles (au NW) ;

13 Pas moins de 8 confréries religieuses se sont installées à Spy à cette période : Pères blancs Capucins, Soeurs des Pauvres Clarisses Colettines, Soeurs Visitandines, Soeurs N.D. de Sainte Erme, Soeurs Ursulines, Soeurs N.D. de la Providence et Soeurs Oblates du Coeur de Jésus ;

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18 décembre 2012 2 18 /12 /décembre /2012 21:30

     La bibliothèque, qui avait été reléguée un jour dans le grenier de la maison familiale, y a poursuivi son existence pendant plusieurs décennies. Les livres continuaient à se soutenir l'un contre l'autre, comme pour se protéger de la poussière, de la lumière traversant la tabatière, comme, dans un élan de solidarité, pour se souvenir du temps de leurs lectures, de leurs manipulations, de leurs joies d'avoir vu passer le temps sur un recoin de guéridon ou de table de nuit de la chambre à coucher.

     Après y avoir détaillé les dictionnaires d'Emile, le grand-père (voir article : Les dictionnaires du grand-père) et relevé la présence des romans de Jean TOUSSEUL, lus par Georges (voir article : L'influence de l'école moyenne de Jodoigne), il nous restait à poursuivre l'inventaire. A ces deux séries extraites de l'ensemble de la bibliothèque, et hormis ceux qui y étaient par obligation à titre individuel, à l'image de tous ces inoxydables repris par séquence dans la collection littéraire LAGARDE et MICHARD, et qui pourraient se retrouver sur les étagères d'une exposition du type " Musée de la lecture d'autrefois ", on y découvrait aussi les romans mettant en exergue le personnage truculent de Toine CULOT. 

    Cette série, oh combien célèbre en pays wallon, est l'oeuvre d'Arthur MASSON (1896-1970), docteur en philosophie et lettres mais surtout écrivain belge d'expression française. Constituée de cinq romans, insérant à travers les pages des dialogues en dialecte wallon, elle se dénomme " La Toinade ", car  tournant autour de son héros Toine CULOT, personnage apparu en 1938 dans le premier de la série Toine Culot, obèse ardennais. Puis suivirent successivement Toine, maïeur de Trignolles1 en 1940, Tanasse et Casimir en 1942 et en dernier Toine dans la tourmente, vol. 1 et 2 en 1946.

      Les cinq romans se trouvaient là, sur les étagères du grenier, reconnus pour avoir diverti une génération de wallons pendant et après la seconde guerre mondiale. En alliant un esprit d'observations, la description de la vie rustique, l'expérience de la psychologie paysanne et une riche galerie de portraits villageois, la lecture de ces romans permettait de compenser le sentiment d'oppression d'une armée d'occupation. Une forme d'expression silencieuse et de conscience sélective. En Toine et sa femme Hilde, la Wallonie possède de fait son César, son Honorine, tous deux sortis précédemment de la verve provençale de Marcel PAGNOL.

       Pour l'attester, voici une pépite de dialogue en wallon :

           Toine : Je ne suis né pu biesse qu'ène aut'

           T Deome (le cousin) : Ca, je vous ben le crwère....Mais dji vourrè bin vier l'aut quant mêm

      Arthur MASSON ne se limita pas à retranscrire son personnage fétiche. Il fut un auteur du terroir prolixe, ce qui lui permit de faire également partie de la liste des cent wallons du XXème siècle, tout comme Jean TOUSSEUL.

      La présence, dans le grenier, de cette série de romans sur Toine CULOT confirme bien que Georges ait combattu dans le silence en s'enrichissant de la lecture de ses personnages fleurant bon le terroir et l'identité wallonne.

      Et c'est sans me faire prier que de nos jours, encore que ce soit trop rare, j'apprécie de descendre cette jolie vallée du Viroin, le long de laquelle se retrouvent les lieux empruntés par les personnages de la Toinade. Un espace de bois, de pelouses sèches calcaires et d'herbages où l'on y trouve encore des orchidées sauvages. Entre Couvin et Treignes2, en passant par Fagnolles3, Nismes, Vierves-s/Viroin3, Olloy-s/Viroin, Matagne-la-Grande, Matagne-la-Petite, Romerée, Gimnée, Niverlée, Vaucelles, Mazée, Doische, avant de se jeter quelques encablures plus loin dans la Meuse du côté français, on pourrait se croire un peu hors du temps. La belle région naturelle de la Calestienne4 est à découvrir pour ses paysages, ses villages, ses musées, sa géologie, sa flore. En voiture, à pied, en vélo le long du RAVEL5 ou en prenant le Chemin de fer touristique des Trois Vallées6, le choix y est diversifié.  

     Que dire alors des lieux comme le Fondri des Chiens7 et le rau des Fonds de Ri qui donnent à cet espace, via notre patronyme, un certain air d'appartenance, d'appropriation et de bien-être quand on s'y promène. Mais de cela, Georges n'y avait certainement pas pensé, lorsqu'il lisait les péripéties de Toine CULOT.

   

1 Trignolles est la contraction des villages de Treignes et de son hameau de Matignolles, tous deux situés dans la vallée du Viroin, appartenant à la région naturelle de la Calestienne ;

2 Le village de Treignes vaut le détour, non seulement pour ses paysages, mais aussi pour ses  musées : L'Espace Arthur MASSON, L'Ecomusée du Viroin, Le Musée du Malgré-Tout , Le Musée du Chemin de fer ;

3 Fagnolles et Vierves-s/Viroin sont inscrits dans la liste des plus beaux villages de Wallonie ;

4 La Calestienne est une région géographique et géologique particulière, s'étendant du SW au NE, de Chimay à Aywaille, d'une largeur de 10 km , formant un serpent entre la région Fagne-Famenne et l'Ardenne ;  elle se caractérise notamment par la présence de grandes grottes calcaires (Han-s/Lesse, Hotton, Aywaille, Remouchamps,..) ; voir site http://www.fossiliraptor.be/la%20calestienne.htm ;

5 RAVEL (Réseau Autonome des Voies Lentes), appelation wallonne équivalent aux voies vertes; édifiées sur les anciennes voies de chemin de fer, trams et chemins de halage ; dans ce cas, il s'agit de la liaison Mariembourg-Hastière d'une longueur de 28,4km ;

6 Trois Vallées : dénomination englobant les vallées de l'Eau Noire et de l'Eau Blanche qui en se rejoignant donnent naissance au Viroin à partir de Nismes ;

7Fondri des chiens : belle dépression karstique, située sur le village de Nismes, d'une vingtaine de mètres de profondeur ; anciennement exploité pour l'extraction du fer; classé Réserve naturelle ;

 

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14 décembre 2012 5 14 /12 /décembre /2012 11:46

     L'histoire de l'ophtalmologie ne peut ignorer la présence et le développement de cette spécialité sur le sol français. Il faut remonter à Henri PARINAUD (1844-1905), considéré comme le fondateur de l'ophtalmologie française et à Emile JAVAL (1839-1907), père de l'orthoptie et initiateur de travaux sur le strabisme, pour en repérer la cuvée millésimée d'origine.

     C'est dans ce bain de jouvence que devait naître Jean PARFONRY en 1895, très probablement à Paris. Avec un prénom porté déjà par quelques uns de ses ancêtres, il y développera ses compétences (voir article : Jean PARFONRY, un oeil de maître). Diplômé en 1924 des Internes en Médecine des Hôpitaux de Paris, il s'occupera d'ophtalmologie infantile à l'Hôpital Lariboisière avant de transiter comme chef de service ophtalmologie à l'hôpital Saint-Louis puis à l'hôpital Laennec (voir article : Jean PARFONRY à l'hôpital Lariboisière). Durant tout son parcours professionnel, il pourra ainsi bénéficier de la dynamique liée à ce domaine de la médecine. Parmi ses rencontres, on en relèvera quelques unes, celles qui l'influencèrent et lui apportèrent aussi une certaine renommée au niveau de l'ophtalmologie, plus particulièrement en matière de recherche sur le strabisme. De cette garde rapprochée, on en retiendra plus particulièrement trois.

      Jean aura eu l'opportunité d'être l'élève d'Albert POULARD (1874-1950), lequel à la singularité d'être le fils de la Mère POULARD, la célèbre .... casseuse d'oeufs du Mont-Saint-Michel. Cette brave dame, ou du moins sa descendance, a ainsi réussi à laisser croitre le prix d'un cm2 d'omelette sur les mêmes bases comparatives à celui du m2 de surface dans un appartement de nos jours1. D'où la nécessité d'avoir de bons yeux pour séparer le jaune du blanc, base indispensable de la réussite de la recette, s'est sans doute écrié son fils Albert, qui avait ainsi logiquement trouvé de visu sa voie !!.  Albert transmettra donc son savoir, sans la recette de la confection de l'omelette, à Jean. De cette rencontre avec POULARD, auteur par ailleurs de l'édition d'un traité d'ophtalmologie en deux tomes en 1923, il en résultera même une publication commune en 19272 mais surtout un document spécialement dédié à son professeur en 1951, peu de temps après le décès de ce dernier en 19503.

      Une autre personnalité marquante du parcours de Jean PARFONRY est sans aucun doute Edward HARTMANN (1893-1975). De la même génération que lui et élève également de POULARD, ce personnage offre un profil atypique pour l'époque. De mère américaine et de père alsacien, né à Maisons-Lafitte, il devint neuro-ophtalmologue, passant une grande partie de sa carrière à l'hôpital Lariboisière, succédant à un autre grand ophtalmologue en la personne de Victor MORAX (1866-1935), le découvreur du bacille Moraxella lacunata, à l'origine de la conjonctivite chronique. Revenant des Etats Unis, il va créer à l’hôpital Lariboisière le premier centre français de traitements orthoptiques et former plusieurs générations d'orthoptistes remarquables. Edward HARTMANN aura la chance de survivre plus de 20 ans au décès précoce de Jean PARFONRY, survenu à l'âge de 58 ans. Si Jean eut droit à une reconnaissance  de la part de ses collègues, que dire alors des marques de sympathie à l'égard de son grand ami HARTMANN4. Quelques extraits de son éloge funèbre5 nous font découvrir un profil tout en grandeur:

            On perd un ami, un chef ou un professeur mais l'ophtalmologie française perd l'un de ses plus brillants représentants......

         Sa distinction, sa stature, son élégance naturelle et probablement son origine anglo-saxonne, faisait de lui un gentleman dans tous les sens du terme. Pour nous français, il était d'ailleurs un grand Monsieur.

      Un autre personnage est également resté  au contact de Jean PARFONRY. Il s'agit de l'un de ses jeunes collègues, l'ophtalmologue Louis POLLIOT, diplômé en 1940. Outre son hommage retrouvé sur Jean PARFONRY,

            Le docteur POLLIOT rend hommage à son maître le docteur PARFONRY trop tôt disparu pour mener à bien l'achèvement de son rapport

POLLIOT fut celui qui finalisa la publication essentielle  de celui-ci6.

       Quelques années après le décès de ce dernier, dans un esprit de reconnaissance, Louis POLLIOT opèrera Jeannine, l'épouse de Pierre PARFONRY, le neveu de Jean. Atteinte depuis sa jeunesse d'une maladie de l'oeil gauche qui la rend aveugle, une première opération en 1935 l'avait plongée de longs mois dans le noir absolu, un bandeau sur l'oeil. Depuis lors, la pathologie de l'oeil continuait à évoluer sur le plan inesthétique. Bénéficiant de la renommée du docteur Jean POLLIOT, elle sera en 1962 l'une des premières patientes à subir une énucléation de l'oeil en bénéficiant de la suture des muscles oculomoteurs et de la pose d'une prothèse7.

      La lignée du savoir est ainsi complète. Successivement, avec le mentor (POULARD), puis le collègue de travail (HARTMANN) et au final le disciple (POLLIOT), on a une continuité parfaite permettant une transmission des connaissances. Avec une façon d'apporter cette touche finale à ce parcours, en forme de reconnaissance à la famille, au contact de plusieurs générations d'ophtalmologues réputés. Le cercle s'est en fait transformé en ligne pour la transmission. Le savoir, il est vrai, ne peut survivre en vivant en vase clos.

 

1  Avec un prix  de l'omelette qui grimpe rapidement dès que vous êtes assis ; la cohérence des chiffres ne semble pas être la transparence principale ;

2 POULARD A. et PARFONRY J (1927) : Revue analyique des travaux d'ophtalmologie infantile, Revue française de pédiatrie, Bd 3, Nr 2, p.219-244;

3 PARFONRY Jean (1951) : Albert POULARD (1874-1950), Archives d'ophtalmologie et revue générale d'ophtalmologie, 11(5) p. 479-482 ;

4 Sa personnalité était encore vivace dans l'appréciation qu'en laissait paraître Françoise, la fille de Jean PARFONRY, lors de notre première rencontre à Briou ;

5 British Journal of Ophthalmology, Dec. 1975, Vol.59, n°12, p. 745 ;

PARFONRY Jean et POLLIOT Louis (1953) : Le traitement chirurgical du strabisme concomitant, 86 pages, Société d'Ophtalmologie de Paris, éd. Charles-Lavauzelle, Paris ;

7 Cette information m'a été fournie par Agnès la fille de Jeannine et de Pierre PARFONRY ;

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12 décembre 2012 3 12 /12 /décembre /2012 09:47

      Un nouveau document, extirpé des archives de la Province d'Anvers (dénommées Felix Archief), vient d'apparaitre à la surface. Sa découverte récente découle d'une recherche basée sur d'éventuelles erreurs de transcriptions du patronyme. Un premier à apparaître fut celui intitulé " Inventaris van het archief Dumercy ", numéroté LZ 73 et rassemblé en 1996 par Daniel COSIJNS. DUMERCY fut un avocat anversois ayant exercé de 1838 à 1853. Au sein de cet inventaire, se trouvait un petit dossier de quelques feuillets intitulé " Parfoury contre Laruelle (1839) ". L'erreur d'écriture était manifeste car la combinaison de la ville d'Anvers et la date de 1839 nous permettait d'avoir une quasi certitude que nous allions découvrir le nom de Jean PARFONRIJ comme partie prenante de ce dossier. Dans son acte de mariage de 1821 à Neerheylissem, il était mentionné que Jean habitait déjà de fait à Anvers à cette période (voir article : L'acte de mariage de Jean et de Jeanne).

    La lecture des différents feuillets du dossier fit comprendre que l'on traitait une affaire relative à un problème de non-payement de loyer. Les intervenants étaient au nombre de cinq. Il y avait :

      - Jean PARFONRIJ, locataire, l'accusé, né en 1797 à Neerheylissem ;

      - Jean-Matthias DUMERCY (1815-1853), son avocat , résidant Grand-Place à Anvers;

      - J.C. LEYSSENS, secrétaire - avoué, résidant Rempart des tailleurs de pierres à Anvers ;

      - LARUELLE, propriétaire, le plaignant, résidant probablement en Hollande ;

      - E.L.N. BRANTS, président des avoués, résidant rue dite meir-steeg.;

     Le dossier est constitué essentiellement de trois lettres écrites en 1839. La première, du 23 septembre, est relative à une lettre de Jean PARFONRIJ à l'avoué LEYSSENS. La seconde du 24 septembre est de LEYSSENS à l'avocat DUMERCY tandis que la troisième, datée du 3 octobre, est de JEAN PARFONRIJ, directement adressée à l'avocat DUMERCY. Tout cela complété par des notes prises à la sauvette qu'il s'avère assez difficile de lire et de comprendre. L'information n'étant pas suffisante et de plus pas toujours évidente à déchiffrer, on s'en tiendra à faire un simple résumé, essayant en priorité d'apporter ensuite certaines analyses et de retenir certaines conclusions à partir des quelques éléments contenus dans ces feuillets.

     Jean PARFONRIJ est en fait accusé d'avoir quitté son logement, loué à un certain LARUELLE, en août 1939 à Anvers, sans avoir payé tous ces loyers. Il est également accusé d'être parti sans avoir effectué les travaux de peinture. En surplus, s'y ajoute un problème de remise des clefs que l'avoué BRANTS aurait jetées dans la rue, ne reconnaissant pas avoir affaire avec LARUELLE, le propriétaire. PARFONRIJ, qui dit habiter désormais à Bruxelles, se défend en affirmant avoir des témoins pour la remise des clefs et pour le payement de 108 florins destinés à repeindre la maison de haut en bas. La décision finale n'est pas incluse dans le dossier. Le tribunal aurait déjà accordé deux remises de dates pour permettre à PARFONRIJ de rassembler les preuves.

     Laissons nos protagonistes traiter de cette affaire. Ce n'est qu'un fait divers qui encombre toujours de nos jours les tribunaux de justice de paix. L'essentiel est désormais d'extraire les quelques points révélateurs de ce qui s'est échangé entre les différents intervenants et d'essayer d'en donner une interprétation.

     La principale information à retenir consiste dans le fait que Jean PARFONRIJ vivait toujours à la fin de l'année 1839. Jusqu'à présent la dernière date de son existence remontait au 28 février 1837, date à laquelle il déclarait un enfant mort-né à Anvers.  Il indique qu'il a quitté Anvers vers Bruxelles sur un bateau vapeur. Une liaison régulière existait bel et bien à cette époque, deux fois par semaine, le mercredi et le samedi soir, partant de la maison des bateliers située au canal Saint-Jean1.

     Dans sa lettre à l'avoué LEYSSENS, notre Jean PARFONRIJ dit avoir attrapé froid sur le bateau (... je serai rétabli de ma maladie que j'ai gagné sur le vapeur d'Anvers à Bruxelles). Très malade en arrivant à Bruxelles, il a du  loger dans une auberge avant de s'installer dans son nouveau logement (Une fois ici j'ai été pendant huit jours malade à l'auberge sans pouvoir me rendre à mon nouveau domicile dont je suis maintenant installé, mais malheureusement encore malade sans pouvoir sortir sur les ordres de mon médecin)

    L'autre information essentielle réside dans la mention de son nouveau logement à Bruxelles, situé au 44 de la rue Haute2. Manifestement, ce n'était pas le quartier chic de Bruxelles. La rue Haute, située au coeur du quartier historique des Marolles, est une rue populaire, l'une des plus anciennes de Bruxelles. Elle était constituée à cette époque de nombreuses maisons ouvrières serrées, répondant par là à l'accroissement de population de la capitale. La salubrité des lieux n'est pas également ce qui  est relaté de mieux pour l'époque. Rien n'indique par contre qu'il se soit déplacé seul où non. L'information aurait pu s'avérer déterminante si un élément avait permis de reconnaitre la présence de Ferdinand, l'un des fils supposés de Jean et qui est selon toute logique né vers 1830. Ce déplacement en septembre 1839 vers Bruxelles coïncide plus ou moins par contre avec l'arrivée de son fils aîné Francois-Xavier en France, estimée vers 1840.

    Il est aussi attesté que ce n'est pas la première fois que Jean PARFONRIJ avait recours à l'avoué LEYSSENS (.....vous êtes l'homme par excellence qui m'avez tant de fois tiré de l'embarras.et qui m'en tirerez encore...). Ce qui n’atteste pas nécessairement qu’il ait un lourd passé judiciaire si on peut situer son arrivée à Anvers avant 1821. Pas vraiment un saint homme ou tout simplement quelqu'un sur qui tombaient de tant en tant des tuiles ?

    La mention d'un payement en florins (j'espère que pourront faire valoir ses 108 florins que j'ai du payer au peintre pour son compte vu qu'il avait dit en présence de témoins qu'il fera repeindre la maison de haut en bas ) indique que l'on fait encore référence à la monnaie hollandaise, l'ancien occupant. Indépendante depuis 1831, la Belgique avait pourtant choisi depuis la loi du 5 juin 1832 le franc comme unité. En 1839, date de cet épisode, on pouvait trouver des pièces de 1/4, 1/2, 1,2 et 5 francs en argent ainsi que des 1, 2, 5 et 10 centimes en cuivre. Une autre explication consisterait à envisager que Jean avait contracté un bail de location du temps de la période hollandaise, soit quelques 8 années antérieurement.

     La mention d'une attribution d'avoué, jouant d'intermédiaire entre le quidam et l'avocat est une fonction qui n'existe plus depuis le 1 octobre 1970 en Belgique et le 1 janvier 2012 en France. Il s'agissait d'un officier ministériel chargé de faire tous les actes relatifs à une procédure et de faire connaitre les prétentions de son client. Fonction qu'il convient de distinguer de celle d'avoué au Moyen-âge qui était attribuée à un Seigneur chargé d'être le protecteur, le défenseur des droits d'une église (ex. : Godefroid de Bouillon a été l'avoué du Saint-Sépulchre, après avoir pris Jérusalem). Dans le dossier qui nous concerne, Jean PARFONRIJ écrit ses observations à l'avoué LEYSSENS, lequel en restitue par la suite des éléments à l'avocat DUMERCY en demandant de lui fournir des instructions nécessaires pour sa défense.

     L'étude du dossier ne nous apprend rien sur l'existence de sa femme Jeanne LALMAND, épousée en 1821 (voir article : L'acte de mariage de Jean et de Jeanne). Curieusement, il est fait mention dans le courrier d'une personne qui ne serait pas son épouse (Cette Dame que je vous envoye Monsieur Leyssens, est une très brave dame qui s'intéresse beaucoup à mon sort ; Ayez la bonté de remettre à cette Dame les restant de mes pièces qui sont chez vous). On ne saura évidemment jamais qui était cette Dame.

    Il fine, il semble que cette affaire ait mis Jean PARFONDRIJ en situation critique (vous êtes l'homme qui s'intéresse au sort des malheureux...;  mon arrivée ici a été marquée par un bien triste commencement ; ....Et maintenant encore poursuivi par un homme qui est la cause de ma ruine ).

     Le fait que tous les documents et notes personnelles soient écrits en français n'a rien d'étrange même si l'on se situe à Anvers. Du moins, cette situation était normale pour l'époque ou la langue de la bourgeoisie était le français.

     En conclusion, ce dossier, récupéré aux archives d'Anvers, est quelque peu décevant. Il n'aura pas apporté de nombreuses informations supplémentaires sur ce Jean PARFONDRIJ, lequel est le père de François-Xavier, le marbrier français. La raison de son départ vers Bruxelles ne se trouve pas dans le dossier. Exerçait-il encore le métier de domestique, mentionné sur son acte de mariage de 1821 ? Aucune information également sur ses proches. Le fait qu'il écrivait assez correctement en français, qu'il louait une maison à Anvers et son déplacement vers Bruxelles dans la rue Haute, en septembre 1839 en sont les seules données à mémoriser.  La convergence de situation avec l'arrivée de son fils en France reste aussi un élément à considérer, sous réserve d'indices plus probant.

     En ce qui concerne son niveau d'instruction, on se souviendra qu'il n'avait que 6 ans au décès de son père le maître-charron à Neerheylissem. Ce qui n'a sans doute pas du faciliter son éducation. Néanmoins, on constate que son écriture et sa signature présentent une certaine sophistication qui mériterait d'être reprise dans le document de synthèse. Comme pour d'autres à cette époque, l'écriture du nom avec les deux points sur le y n'est en rien anormale.

   PS : Je remercie Pierre H et Patrick P qui se sont investis pour me permettre d'ouvrir les fichiers qui m'avaient été transmis des Archives d'Anvers.

1 Guide commercial ou Liste d'adresses de la ville d'Anvers et de ses environs pour l'année 1840, par Henri RATINCKS ;

2 Le 44 rue Haute se trouve de nos jours à proximité de la Place de la Chapelle ; rien n'est moins sur que ce soit la même numérotation qui soit utilisée ;

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6 décembre 2012 4 06 /12 /décembre /2012 17:02

     Les étagères des placards nous avaient déjà fait redécouvrir les dictionnaires du grand-père (voir article : Les dictionnaires du grand-père). Plus volumineux,  plus compacts, plus attractifs, répondant plus à une curiosité, ceux-ci occultaient le reste de l'espace. Même si celui-ci était rempli d'autres découvertes, d'autres livres, il ne relevait pas à nos yeux du même intérêt.

      Il nous a fallu en quelque sorte digéré pendant un certain temps les volumineux dictionnaires du grand-père. Comme pour en apprécier par le toucher, par la lecture, par la vision, que le temps s'était écoulé suffisamment pour les jeter dans une autre dimension, celle qui insère les objets sur une autre échelle, celle de la mémoire, de l'histoire, du souvenir, voire celle qui les fait apparaître sur les brocantes, chez les antiquaires.

      Et après avoir suffisamment feuilleté ses pages descendantes de l'ère pré-virtuelle de l'humanité, l'oeil s'est petit à petit acclimaté à la lumière qui faisait ressortir tout le contraste et toute la différence de ce qui complétait ces étagères. Une sorte d'éventail des lectures auxquelles s'étaient astreints ceux de la lignée familiale qui avaient été forcés d'incorporer non pas nécessairement un savoir mais bien une manière de récit, de pensée où le verbe se marie avec l'histoire imaginée des personnages.

      Ces livres  nous avaient ainsi permis de retrouver ce qui avait du constituer les lectures de mon père Georges pendant ses jeunes années.  Un emploi du temps qui comme tous les jeunes, gravitant au travers des années d'humanités secondaires, n'était pas nécessairement volontaire et apprécié mais bien obligatoire et obligé. Ainsi, au milieu de ses quelques livres mythiques qui fleurent bon la bonne littérature française, on découvrait la seule série de livres écrits par un même auteur, pratiquement inconnu de nos jours, belge de surcroit.

      Cet écrivain se nomme Jean TOUSSEUL (1890-1944), pseudonyme découlant de son statut d'ouvrier-écrivain autodidacte. Originaire de Landenne, intégrée dans la commune actuelle d'Andenne, son oeuvre1 y décrit le plus souvent les paysages, les atmosphères et les gens de la région mosane. Ecrivain à caractère profondément régionaliste et pacifique, il refusera toute collaboration avec l'occupant au cours des deux périodes de guerre. Etait-ce par volontarisme où par obligation que Georges avait compulsé de nombreux romans de cet auteur wallon d'expression française ?  Difficile d'y répondre, même si on peut déceler dans cette lecture une vision régionale empreinte de beauté et de quiétude qui ne devait pas déplaire à Georges. Jean TOUSSEUL sera repris plus tard dans la liste des 100 personnalités wallonnes du XXème siècle2, publiée en 1995 par l'Institut Jules Destrée, dont le point de résonance sera axé sur la défense d'un mouvement et d'une identité wallonne.

      De son parcours à l'Ecole moyenne de Jodoigne, laquelle avait développé une section gréco-latine complète depuis 1927, un seul nom de professeur nous est parvenu, à travers les paroles de Georges. C'est celui de Michel BRIQUENEER, précisément son professeur de latin et de grec. Sans s'étendre dans une logorrhée assommante, il était toujours question de sa fin tragique.  Et surtout, avec le recul sur la vie, on peut penser de nos jours que la philosophie de ce personnage s'est diluée quelque peu dans le soma de Georges. D'une grande érudition, ce professeur avait accumulé toute une série de diplômes3 avant de se faire nommer en 1927 comme chargé de cours de latin et de grec.

      La grande singularité de ce dernier est d'avoir été un pacifiste convaincu, membre de la War Resisters' International4, organisation créée en 1921 et dont le symbole est le fusil brisé (Broken rifle). Pacifiste dans l'âme, il fut ainsi le seul à refuser de travailler sur un des principaux aérodromes (probablement celui de Beauvechain),  d'oµ partaient les stukas pour aller bombarder l'Angleterre5. Pour des raisons non élucidées, il fut abattu en 1944 au cours d'une promenade avec sa petite fille6. Apparemment, certains auraient vu en lui, par sa façon de penser, un collaborateur à l'occupant7, sans doute aussi par son refus de faire partie de l' Armée secrète où du Front de l'Indépendance8 .

      Georges a terminé avec fruit, en juillet 1939, ses humanités anciennes (section latin-grec) à l'Athénée de Jodoigne9, toujours dénommée Ecole Moyenne10. Comment ne pas y voir une liaison entre ces deux personnages de Jean TOUSSEUL et Michel BRIQUENEER. Vivant à la même période, ils ont pu se côtoyer. Tous deux pacifistes convaincus, ils auraient donc servis de pièces à conviction à Georges pour l'amener à consolider sa carapace d'adolescent. On peut en déduire que ce serait sur les conseils de son professeur que Georges aurait apprivoisé l'écriture de Jean TOUSSEUL. Une découverte qui nous donne, par ce simple raisonnement, une nouvelle façon du fonctionnement de Georges. Et qui pourrait expliquer sa propension à s'immiscer à plusieurs reprises dans le tissu associatif local, en y occupant systématiquement la présidence, sans passer par le travail préalable des petites mains. Comme pour pouvoir rester au dessus de la mélée en y jouant le rôle de modérateur, de consensus, en somme de pacificateur.

      Et comment ne pas y voir dans cet écrivain une sorte de fil d'Ariane prolongeant le lien entre générations. Ainsi, dans l'attente d'un contrat, peu après l'écueil de mon aventure congolaise (voir article :  Plus de laissez-passer pour le Congo !), j'ai enseigné, à peine deux semaines il est vrai, à l'Ecole moyenne d'Andenne, laquelle porte la dénomination de cet écrivain Jean TOUSSEUL.   

 

1 Son oeuvre la plus célèbre est "La saga de Jean Clarambaux ", constituée de 5 volumes dont le premier intitulé "Le Village gris", en est le titre le plus connu ;

2 Liste des 100 wallons du XXème siècle, sur le site http://www.wallonie-en-ligne.net/1995_cent_wallons/ ;

3 Docteur en philologie classique, Docteur en droit, en histoire, en philologie romane et philologie germanique ;

4 Internationale des Résistants à la guerre en français ; cette organisation, qui a eu des liens après-guerre avec le Mouvement de Gandhi, et active en de nombreuses occasions, existe toujours de nos jours ;

5 Article du journal Le Soir du 3 décembre 1996 : Un dico pour panthéoniser les prolos ;

6 Cette petite fille, Annie  BRIQUENEER, est décédée durant l'année 2012, à l'âge de 90 ans ; une piste pour redécouvrir un peu de mémoire est ainsi disparue ;

7 VERDICKT Marc (1993) : Athénée royal : 150 ans à Jodoigne, Imprimerie Genicot, Jodoigne ;

8 Armée secrète (AS) : seule organisation de la résistance travaillant directement avec le gouvernement belge en exil à Londres ; plusieurs élèves et professeurs de l'école moyenne de Jodoigne, membres de l'AS, sont morts en déportation ;

Front de l'Indépendance (F.I.) : organisation de résistance belge soutenue par le parti communiste ;

9 Diplôme et certificat de Georges PARFONRY , signé notamment par Victor HUSSIN, Préfet ; Emile CHARLOT, Notaire et Président de la Commission administrative ; Léon COUNE, professeur de français ; Edgard VOLON ; Anatole CHARLOT, professeur de musique ; ...

10 Le titre changera officiellement le 27 août 1947 avec l'Arrêté du Régent ;   

   

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28 novembre 2012 3 28 /11 /novembre /2012 14:19

      L'idée d'une randonnée  dans les rues de Paris, en prenant comme thématique les lieux où l'on peut découvrir les marbres de François-Xavier, a déjà été évoquée dans ce blog. Pour en permettre son tracé, la première étape consiste à inventorier les endroits qui ont été successivement relatés et qui se rapporte à une présence avérée de ce marbrier.

      L'énumération est malheureusement loin d'être exhaustive. Sa brillante carrière en tant que chef d'entreprise entre 1850, année où il s'installe dans la rue Traversière Saint-Antoine, jusque 1895, année où il arrête ses livraisons à la Manufacture de Sèvres, est insuffisamment étoffée par le nombre des repères retrouvés. 

      Néanmoins,  cette ballade, au gré des édifices mentionnés, à de quoi faire visiter les beaux quartiers de Paris. Le Paris touristique, le Paris bourgeois, le Paris des ministères, le Paris de la finance, le Paris des hôtels particuliers, le Paris des musées sont ainsi tour à tour traversés. Essentiellement concentré sur la rive droite de la Seine, il se permet malgré tout une incursion dans le 7ème arrondissement, le seul situé en rive gauche mais oh combien important par le contenu de son inventaire et la présence de la Tour Eiffel.

     Cet itinéraire n'omet pas de passer dans les différents quartiers où François-Xavier s'est installé. De la rue Traversière Saint-Antoine à la rue Saint Sabin (11ème Arnd.), en passant par la rue Saint-Pierre Amelot, on y perçoit ainsi l'environnement de son travail et de son domaine privé.

     Et on termine par quelques endroits situés à l'extéreur de l'enceinte parisienne. Avec en particulier, cette proximité avec les lieux fréquentés à la même époque par les peintres impressionnistes, en bordure de Seine, parmi les canotiers, les guinguettes au bord de l'eau.

      En y combinant de fréquentes visites, ce circuit doit rester modulable, au gré des sujets d'intérets et de la disponibilité de chacun. Il offre aussi une petite  diversion vers le Nord de la capitale pour aller visiter une mairie classique du style néo renaissance, ornée de marbres qui ne peuvent qu'engendrer notre curiosité.

     Voici, classé par ordre numéral des arrondissements, les lieux qui émettent encore, plus d'un siècle après, un certain parfum de recueillement et de réalités matérielles sur ce qui reste de cet aïeul, né dans un petit village du Brabant wallon, et qui a admirablement  réussi à s'intégrer à cette société française de la seconde moitié du XIXème siècle, en pleine  recherche de nouvelle identité politique et économique.

     La grande inconnue est de déterminer si cette présence est encore bien réelle dans tous les endroits répertoriés. L'incendie des Grands magasins du Printemps en 1921 a probablement anéanti l'oeuvre en marbre. L'existence de la cheminée transmise comme donation à l'hôtel Carnavalet est restée sans réponse à nos demandes écrites. Il en sera sans doute de même pour certaines rues et certains bâtiments dont la conception s'est adaptée aux nouvelles sociétés.

2ème arrondissement

Galerie de l'Hôtel de Toulouse, au 35 rue Croix des Petits-Champs (actuellement Banque de France) : Cheminée ;

3ème arrondissement

Musée Carnavalet, 23 rue de Sévigné : cheminée de style Louis XIV (don) ;

6ème arrondissement

Partie des Bâtiments de l'Ecole coloniale, angle rue de l'Observatoire et rue Auguste Comte ;

7ème arrondissement

Square de la Place Santiago du Chili : Fontaine ;

Hôtel du Prince Paul Demidoff, rue Sainte Dominique : colonnade et plafond Renaissance du vestibule ;

Bureau de météorologie de l'Hôtel des écuries de l'Alma (actuellement Palais Branly) ;

8ème arrondissement

Place François 1er : Fontaine ;

Hôtel au 38, Avenue Marceau (détruit en 1910 ??);

Hôtel à loyers Avenue des Champs Elysées, coin rue Pierre Charron ;

Hôtel particulier d'Eugène RITT, angle rue Balzac et rue Lord Byron  ;

Gare Saint-Lazare : travaux de reconstruction (bel escalier double, côté Cour de Rome) ;

9ème arrondissement

Hôtel du Figaro, 26 rue Drouot ;

Nouvel Hôtel de la Société des Ingénieurs Civils, cité Rougemont ;

Grands Magasins du Printemps, angle Bd. Haussman et rue du Havre : Pont galerie et paliers d'arrivée des deux grands escaliers extrêmes (probablement endommagés lors de l'incendie de 1921) ;

11ème arrondissement

Maison d'habitation : rue Saint-Sabin ;

Atelier : Rue Traversière Saint-Antoine ;

Atelier : Rue Saint-Pierre Amelot ;

17ème arrondissement

Hôtel particulier : rue Jouffroy d'Abbens

Maison - Lafitte

Nouvelle mairie, avenue de Longueil (actuellement située sur l'Avenue Jean Monet) : travaux de rénovation ;

Le coin des impressionnistes, en bordure de Seine dans les Yvelines (anc. Seine-et-Oise)

Maison de campagne de M. Toché à Croissy

Villa Avenue de Brimont à Chatou

Versailles

Aile sud du Palais de Versailles : Chambre des députés ;

Créteil

Villa Les Buttes

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27 novembre 2012 2 27 /11 /novembre /2012 18:11

     Suite à l'indépendance de la Belgique déclarée le 4 octobre 1830 par un gouvernement provisoire, les discussions pour l'élaboration d'une Constitution furent menées au sein d'un Congrès National, choisi à partir d'une levée de 30 000 électeurs. Les nombreux débats relatifs à son élaboration y sont intégralement retranscrits. Ce qui nous donne déjà un petit aperçu de ce que seront par la suite les débats parlementaires au Parlement et au Sénat.

    Au milieu de ces centaines d'interventions de gens en grande majorité de la bourgeoisie, on distingue une seule, minuscule, apparemment sans lien réel avec le sujet débattu, à savoir les articles de loi relatifs aux collèges électoraux. Elle mentionne de l'existence d'un certain André de PARFONDRIEU. Cette personne, qui apparemment ne fait pas partie des membres du Congrès, aurait ainsi envoyé une communication qui y sera lue par le secrétaire de séance.

     Ci-dessous, on découvre ce qui est relaté de cette lettre. Un bref résumé, assez peu détaillé qu'il convient d'interpréter autant que possible.

Chevalier Emile Huyttens (1844) : Discussions du Congrès National de Belgique. Séance du 15 février 1831; Tome II Soc. Typographique belge, Bruxelles,

p. 520 : Mr André de Parfondrieu, qui se dit descendant de l'ancienne maison de Luxembourg, fait connaître au Congrès comment cette maison a été traitée en Hollande.

     En premier lieu, la mention d'un André de PARFONDRIEU constitue la justification indéniable de l'insertion de cet article dans le blog. Hormis l'adjonction de la particule, l'écriture sous la forme de "PARFONDRIEU" est une résurgence de celle ayant été trouvée dans certains écrits du Moyen âge et qu'on croyait être disparue. De là, la difficulté de faire un lien avec le Baron Jacques de PARFONDRY, décédé en 1824 et dernier de la lignée.  Aucune autre indication de ce nom n'a été trouvée sur les sites de généalogie.

     L'apparition de la terminologie " Ancienne Maison du Luxembourg " me laisse un peu dubitatif. Il est en effet attesté que ce nom de famille PARFONDRY avec tous ses dérivés, que ce soit avec ou sans particule, est resté colloqué au sein du territoire de la Principauté de Liège jusque la fin de l'Ancien Régime, à savoir en 1794, année de l'intégration dans la France de Napoléon. La Principauté de Liège, pour le rappeler, est restée indépendante jusqu'à cette date. Jusqu'à preuve du contraire, aucun lien du patronyme n' a été relaté avec le Luxembourg jusqu'à présent.

     Sur le plan chronologique, l'Histoire de la maison du Luxembourg se termine en réalité dès la première moitié du XVème siècle. Le Comté, devenu Duché de Luxembourg en 1354, par décision de l'empereur romain germanique Charles IV, est en effet tombé en faillite peu après. Il fut racheté par le Duc de Bourgogne. Comme toutes les anciennes autres possessions, ce duché de Luxembourg sera par la suite intégré successivement aux terres espagnoles, autrichiennes, françaises et hollandaises in fine.

     Après la défaite de Waterloo en 1815, tous les anciens territoires ayant appartenu à la Basse Lotharingie, issue du démantèlement de l'empire de Charlemagne, passeront sous la juridiction du roi de Hollande Guillaume 1er, descendant  de la lignée des Princes d'Orange, ancienne partie du Duché de Bourgogne, passée en 1544 à la maison de Nassau, et ayant donné l'appelation toujours actuelle d'Orange-Nassau. Le terme "Maison de Luxembourg" aurait été apparemment réhabilité à ce moment. Elle sera considérée comme possession personnelle du roi de Hollande de 1815 à 1890 et celui-ci portera désormais le titre de roi de Hollande et Grand-duc de Luxembourg. Aucune indication ne permet par contre d'attester d'une quelconque spoliation de titre au niveau d'une lignée noble répondant à notre patronyme.

      En 1890, au décès du roi Guillaume III des Pays-Bas, petit-fils de Guillaume 1er, le Grand-duché de Luxembourg retrouve son identité. La scission avec les Pays-Bas s'opère à ce moment, résultant de l'application d'une ancienne convention dynastique de 1783 passée entre les deux branches survivantes de la maison de Nassau. N'ayant pas de descendance mâle, la couronne des Pays-Bas passe à Wilhelmine, la fille de Guillaume III. En vertu de la convention qui se basait sur l'application de la loi salique1, Wilhelmine ne pouvait porter le titre de Grande-Duchesse de Luxembourg. La couronne fut ainsi offerte à Adolphe de Nassau-Weilburg, représentant l'autre branche des Nassau, et lointain parent de Wilhelmine. Ce dernier devint ainsi le Premier Grand-duc du Luxembourg, ancêtre de l'actuel Grand-duc2.

      Pour éviter le risque d'hégémonie des Nassau sur les trois pays, et empêcher un éventuel retour de cette famille, la Belgique établira un décret constitutionnel le 24 novembre 1830, excluant perpétuellement la famille d'Orange-Nassau de tout pouvoir en Belgique. Après avoir du décliner le choix du duc de Nemours, fils du roi de France Louis-Philippe, en évitant ainsi la crispation anglaise, le Congrès National se tourna vers Léopold de Saxe-Cobourg-Ghota3 . Ce dernier monta sur le trône de Belgique le 21 juillet 1831. En compensation, Léopold, qui était par ailleurs, par sa soeur, l'oncle de la reine Victoria de Grande-Bretagne, épousera en 1832 Louise d'Orléans, la fille de Louis-Philippe.

     Pour mémoire, cette loi salique fut appliquée à la lettre pour la désignation des rois de France. L'exemple le plus évocateur est la désignation d'Henri IV, roi de Navarre et au surplus protestant, pour succéder à Henri III, mort sans postérité. En Espagne, la suppression de la loi salique est à l'origine de la guerre des carlistes.

    En conclusion, aucune explication convaincante ne permet de donner de la consistance à l'extrait mentionné ci-devant. L'existence d'un lien entre cet André de Parfondrieu et le roi de Hollande, porteur du titre de Grand-duc du Luxembourg n' a pu être confirmée.  Seule indication, le prénom André se retrouve au niveau du grand-père du baron Jacques de PARFONRY4. Il nous aura simplement permis d'apporter un peu de connaissances sur l'histoire du BENELUX5, bien avant sa création légale.

 

1 La loi salique est une transcription des coutumes germaniques, transmises par Clovis; outre des pays comme la Belgique et le Luxembourg, elle fut d'application en France et en Espagne, mais pas en Angleterre  et aux Pays-Bas ;

2 La loi salique a été supprimée en 1967 au Luxembourg et en 1991 en Belgique ;

3 Léopold avait déjà refusé auparavant la couronne de la Grèce; à la charge de l'Angleterre qui lui allouait une rente non négligeable, pour des faits d'armes antérieurs dans l'armée russe, ce pays souhaitait se débarrasser de ce fardeau ;

4 André, Albert de PARFONDRY, né en 1688 à Liège et y est décédé en 1762 ;

5 BENELUX : Convention économique ratifiée en 1947 entre la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg, qui fut le noyau de base de la construction européenne et de l'espace Schengen ;

 

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Présentation

  • : Le blog de PARFONRY
  • : Le cadre directeur de ce blog consiste à réunir ce qui peut être transmis sur un patronyme. La présentation de tous ces personnages n'est finalement qu'une manière de transférer un patronyme. Qu'il soit culturel, social ou historique, ce patronyme ne fait que proposer un film dans lequel les séquences sont des instants de vie. L'environnement, le vécu de chacun a probablement plus d'impact sur ce que nous ressentons. Les gênes se diluent plus vite que le lien avec le mode de vie et les rencontres. Cette vision oblige à élargir le champs d'investigation en déviant de l'aspect purement généalogique. La découverte de nouveaux indices motive et assimile parfois cette recherche à une enquête. L'histoire ne peut être racontée de manière linéaire. Chaque élément, chaque personnage a droit à son histoire dans le récit tout en suivant le dénivelé et les courbes imposés par les aléas de l'Histoire et de la vie. Contrairement au patrimoine, un patronyme se voit contraint de s'adapter aux vicissitudes des évolutions sociales et des guerres. Le contenu des quelques 350 articles de ce blog a été rassemblé dans un livre intitulé "La véritable saga des PARFONRY de Neerheylissem - L'histoire d'un toponyme devenu un patronyme ".
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