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14 janvier 2015 3 14 /01 /janvier /2015 16:16

      Une fois l'effet de surprise assimilé, suite à la découverte des deux lettres P Y dans un renfoncement d'un marbre attenant à la petite porte d'entrée du Carmel (voir article : Un dernier marbre au Carmel-Créteil 1), l'heure de notre entrevue avec la Mère prieure se précisait. Nous furent reçus de manière très courtoise par Hélène, responsable de l'économat. Elle nous apparaitra plus tard comme la seule partie bien visible de cet îlot d'invisibilité de l'Avenue de Ceinture. Pareil à ce qui se passe dans un cabinet médical, dans une étude de notaire, nous attendions que notre tour arrive pour, croyais-je encore,  avoir un entretien à bâtons rompus avant de faire la visite des lieux. 

    Pour tout dire, à ce moment, j'avais en mémoire le visage de Soeur Clotilde, le personnage un peu déluré, exhalté, comique qui intervient dans la série des Gendarmes à Saint-Tropez. Mais aussi celui de Soeur Madeleine, cette jeune nonne pleine de vie, avec qui j'avais arpenté les allées du verger de l'Abbaye bénédictine de Keur Guilaye, près de Dakar, dans les années 1980. De ces deux seules rencontres, je m'étais fait, à vrai dire, une idée assez joyeuse du monde des nonettes recluses. 

   Après quelques minutes d'attente, l'équipe, que nous constituions, reçut l'autorisation d'entrer dans une pièce située en face de l'économat.  Quelques chaises nous y attendaient, sans autre mobilier usuel. On se trouvait dans un parloir. Quoi de plus normal me direz-vous dans un endroit pareil et quand on y est préparé. C'est alors qu'est apparue devant moi une sorte d'oeuvre d'art moderne, faite de deux cadres verticaux constitués d'épais barreaux de métal foncé de 3-4 cm d'épaisseur. Pire qu'un parloir en milieu carcéral. Et de l'autre côté, on entrevoyait une forme qui bougeait quelque peu. Comme les deux cadres étaient décalés l'un par rapport à l'autre, la vision nous était tronquée, imaginant une masse de couleur noire avec quelques carrés blancs. Nous avions de fait devant nous Soeur Marie-Claire de la Passion, Mère prieure du Carmel de Créteil. Un tel tableau, me suis-je dit, aurait pu influencer Picasso pour développer son art déformé des visages qu'on appelera le Cubisme.

   Je ne puis dire que la première vision, une fois assimilée, m'ait apaisé et rendu à ma quiétude. Ce serait mentir. Alors que ce mot de liberté est de nos jours fort usité, de quelle liberté était-il question dans ce monde contemplatif ? Parler sans ressentir l'expression des sentiments de son vis-à-vis, sans voir le mouvement de son corps, sans goûter au plaisir  de la parole, sans renifler le parfum de la pièce, avec les sons étouffés par l'épaisseur des barreaux. Je découvrais la réalité mystique et ésotérique d'un Carmel.

     

Vue arrière de la villa de Créteil avec la colonne de marbre (début XXème et 2013)
Vue arrière de la villa de Créteil avec la colonne de marbre (début XXème et 2013)
Vue arrière de la villa de Créteil avec la colonne de marbre (début XXème et 2013)

Vue arrière de la villa de Créteil avec la colonne de marbre (début XXème et 2013)

     La Mère prieure, bienheureuse de nous entrevoir, commença par souligner combien il est important de refaire l'histoire d'une famille, de retrouver ses racines. Et manifestement contente de pouvoir désormais expliquer l'origine de l'architecture particulière de la maison (voir article : La villa flamande de Créteil). Agnès s'était donnée, il est vrai, un mal de chien pour lui présenter sur deux pages l'intérêt de notre démarche. Soulignant également les efforts entrepris par sa Communauté pour assurer son entretien. Inscrite dans la liste du patrimoine à préserver de la commune de Créteil, cette villa est évidemment assez dispendieuse pour la maintenir en état. Ce qu'apparemment, et vu de l'extérieur, s'est attelé ce Carmel. Si la cheminée a été rabattue, sans doute pour éviter la chute de briques, le ravalement de la façade a été effectué il y a deux années. L'oeil aguerri de Michel constata cependant que les trois ancres qui avaient servi à maintenir la structure autour de la cheminée n'étaient plus en place. Il serait évidemment trop optimiste d'espérer percer le mystère de leurs suppressions. 

       Point question évidemment de nous permettre de passer outre de ce parloir, au risque de rencontrer l'une ou l'autre des 17 soeurs de cette communauté entièrement dévouée à la prière. Devant nous contenter de la description qui en sera faite. On apprendra ainsi qu'un atelier de reliure était installé au 1er étage dans une pièce très claire pourvue de 6 fenêtres. Sans doute l'atelier de peinture de Paul lorsqu'il s'est installé dans cette villa. Les différents étages sont accessibles par un escalier en colimaçon en bois serpentant dans la tourelle que l'on peut voir de l'extérieur. Aucun marbre ne nous a été signalé, ce qui est évidemment surprenant. Seule, la colonne à l'extérieur, que l'on aperçoit sur une ancienne photo, est toujours en place. D'ou provient - elle ? Probablement importée d'un site de fouille (Grêce, Egypte !!) et installée à Créteil par le marbrier.  

    Un dernier détail intéressant nous sera livré avant de quitter le parloir. L'existence de carrières anciennes dans la région de Créteil, comme il en existe des milliers sous la ville de Paris, a laissé comme vestiges la présence de souterrains à certains endroits. L'un d'eux permettait la liaison avec l'extérieur. Il a du être comblé à un moment par les soins du Carmel afin d'éviter toute visite inapropriée, mettant en péril la quiétude et l'isolement de ce lieu. Seul, le Service Technique des Carrières de Paris est autorisé chaque année à passer une inspection pour en évaluer les risques d'effondrement. 

   Dernière petite information, cette villa a été rebaptisée par cette communauté religieuse. Elle s'appelle désormais Nazareth. Ville israélienne d'ou seraient originaires Joseph et Marie, personne parmi nous n'a pensé a demander l'explication de ce choix. Le dogme préservé dans le Prieuré de Sion, qui constitue la trame du Da Vinci Code, serait-il ici de même nature ? Mais plus prosaïquement, le terme "Ancienne propriété Parfonry " qui se perpétuait dans la mémoire de Créteil, ne pouvait être approprié avec une telle occupation des lieux. Un nouveau nom de baptème fut décidé comme choix du nouveau code d'honneur appliqué dans l'enceinte. Heureusement, il nous reste les deux lettres P Y gravées dans le marbre à l'entrée. Ce sera notre secret pour attester que l'histoire familiale s'est prolongée depuis lors non par le Saint-Esprit mais bien par la Vie et dans un esprit sain.

   Laissons le Carmel dans son silence. Bien des questions restent à la suite de cette visite. Pas de photos d'intérieur. Pas de documents anciens. Pour percer finalement tous ces mystères du Carmel, il ne nous reste plus qu'à nous infiltrer dans l'une des équipes du Service des Carrières de Paris, à l'occasion de l'une de leurs visites annuelles de contrôle. Da Vinci Code n'avait pas prévu cette éventualité !!!!. 

PS : Il est de mon recours de dire que la lecture de cet article doit être envisagée dans le seul contexte de la liberté de penser et d'expression. Tout en m'appropriant l'entiereté de son contenu, il va de soi que je n'ai pas outrepassé, au travers de l'humour et de l'anecdote, le cadre informatif, instructif  et malgré tout ludique lié à cette recherche sur la famille. 

Nous avions été très touchés par l'appel téléphonique préalable de la Mère prieure qui a accepté de nous rencontrer. Déçu néanmoins d'être si proche d'une  preuve du parcours familial, nous imaginons désormais la vie de cet aïeul immigré belge, figurant parmi les bienfaiteurs de Créteil. Pour remercier le Carmel d'entretenir cette maison, certains d'entre nous ont apporté des dons à l'occasion de cette visite. Nous sommes convaincus, par ailleurs, que le contenu de cet article s'avèrera intéressant pour s'intégrer dans l'histoire de ce Carmel. Si aucune suite ne peut étre envisagée, il nous restera des traces et non des preuves. Seules les traces font rêver nous a dit le poète René CHAR. En somme, nous sommes devenus des bienheureux, ayant pu profiter de cette rencontre. 

Photo 1 :Françoise et Agnès devant le grillage d'entrée de la chapelle du Carmel Sainte-Thérèse. Photo 2 : Vue sur la villa prise de l'Avenue de Ceinture
Photo 1 :Françoise et Agnès devant le grillage d'entrée de la chapelle du Carmel Sainte-Thérèse. Photo 2 : Vue sur la villa prise de l'Avenue de Ceinture

Photo 1 :Françoise et Agnès devant le grillage d'entrée de la chapelle du Carmel Sainte-Thérèse. Photo 2 : Vue sur la villa prise de l'Avenue de Ceinture

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5 janvier 2015 1 05 /01 /janvier /2015 16:30

     Henri PAESMANS était le dernier du groupe des quatre qui avait évacué en mai 1940 pour fuir l'avancée de l'armée allemande et dont le périple a déjà été détaillé (voir article : Réfugié dans le Gard). Monsieur le Doyen  ou même le Doyen Henri, comme l'appelaient avec respect et gratitude ses paroissiens, est décédé ce 28 décembre 2014 au presbytère de son village de Nil-St-Vincent où il a achevé sa vie. 

      Le doyen PAESMANS, comme je l'ai déjà mentionné à plusieurs reprises, a été l'élément déclencheur dans ma quête d'entreprendre des recherches sur l'histoire de mon patronyme en général mais surtout sur la famille en particulier. Son parcours spécifique au milieu de cette ribambelle de personnages de cette saga mérite largement d'être présenté et commenté. Cinquante années de pastoralisme dans cette région du Brabant wallon de l'est, qui fut notre terroir, c'est indéniablement un tapis de culture, de connaissances, de rencontres qui nous sont offerts et que l'on ne peut omettre1.

   Henri, Alphonse PAESMANS est né le 1 juin 1923 à Beauvechain. Il est le troisième enfant vivant d'Anna PARFONRY (1884-1973) et de Basile PAESMANS (1885-1956). Il a eu comme parrain son grand -oncle Emile, l'horloger de Bruxelles. Elève doué, sachant déjà lire, il a sauté la première année de primaire. Il n'a de ce fait été au contact de mon grand-père qu'au cours de deux années avant de suivre le cycle supérieur donné par son père. En 1937, il est entré en sixième latine au collège Saint-Albert de Jodoigne pendant que mon père suivait la même section à l'Athénée. Le 12 mai 1940, obéissant aux ordres, il est parti avec son frère aîné Edgard et mon père, en vélo, vers la caserne de Quiévrain pour y être mobilisé (voir article : Réfugié dans le Gard). Au travers d'un petit récit, il a raconté cette escapade dans une lettre envoyée à la suite de la naissance de l'un de mes petits-fils. Voici comme il nous la relate :

A Piétrebais, nous avons récupéré Norbert Lacroix, un ami de collège de mon frère, et nous voilà en route pour l'inconnu. Pas très loin de là, Georges a crié tout à coup : regarde un avion dans le ciel. En même temps la pédale de son vélo a buté contre la bordure de la route et s'est cassée tout net. Mal remise par un marchand de vélo trop pressé, l'engrenage ne tournait plus rond. On a cependant continué avec ce handicap jusqu'à Quiévrain où l'on a trouvé refuge dans une maison abandonnée par ses propriétaires et le soir venu est arrivé le premier bombardement par un avion allemand. Prudemment, nous sommes descendus dans la cave, où Georges, pris de panique, s'est mis à tourner en rond en disant à voix haute son acte de contrition, ce qui ne devait pas lui être habituel, n'étant pas un pilier d'église. Sans demander nos restes, nous sommes partis vers la frontière française qui s'était malheureusement déjà fermée, et nous avons été obligés de dormir à la belle étoile en plein champ par une belle nuit de mai.

    Inscrit au séminaire St-Joseph à Bonheiden-Malines pendant 3 ans puis au Grand séminaire de la rue de Mérode à Malines, il est ordonné prêtre le 28 juillet 1946 à la cathédrale St-Rombaut à Malines. Voulant au départ être missionnaire, la guerre 1940-1945 en aura décidé autrement. On l'a envoyé en mission sur les terres fertiles du Brabant wallon de l'Est dont il était issu, successivement à Neerheylissem, à Noduwez et à Nil-St-Vincent. Il connaissait ce monde rural, constitué de gens de bon sens dont la culture, la sensibilité et le mode d'expression étaient très différents des autres régions parce que leur origine paysanne les faisait entrer dans le changement à un rythme beaucoup plus lentReprochant par ailleurs que les directives pastorales, découlant du concile Vatican II, tenaient peu compte des villages et des mentalités de l'est. 

      Henri PAESMANS a officié en premier lieu comme vicaire à Neerheylissem en date du 9 août, sous la houlette du curé Léon BATAILLE, à qui il devait soumettre son sermon avant de le lire. Paroisse à forte tradition religieuse l'ayant beaucoup marquée, un adage local disait d'ailleurs : Un coup de cloche, tout le monde à l'église, un coup de trompette, tout le monde à la fêteIl racontait volontiers cette histoire :

Des paroissiens mineurs dans les charbonnages liégeois, ayant accompli la pose de nuit, venaient directement de la gare à l'église pour la messe de 7 heures le dimanche. Mal lavés, fatigués, ils s'accroupissaient sous le porche, casquette sur les genoux, et, parfois, tombaient endormis. 

      Quelque mois plus tard, il célèbrera la messe de mariage de mes parents, à Incourt, le 24 mai 1947 (voir article : Le mariage de Georges et Solange). Il restera à Neerheylissem durant 7 années. Sa foi s'y est nourrie à la lecture du Code abrégé de la vie chrétienne du cardinal MERCIER. Le contact avec André De STAERCKE, curé de Piétrain, fut également une heureuse rencontre pour jeter les bases de développement d'une vie pastorale. Et c'est durant cette présence qu'il recensera, dans les archives paroissiales, les informations relatives à la généalogie de notre famille, installée à cet endroit depuis le milieu du XVIIIème siècle. Il récapitula tout cela dans un petit document de synthèse qui fut retrouvé dans les papiers de son cousin germain Georges, mon père.

    Après Neerheylissem, il sera désigné curé dans le village de Noduwez en 1953. Il s'y montrera particulièrement actif, prenant une série d'initiatives qui firent de cette paroisse un lieu d'évangélisation dynamique. Ses parents viendront le rejoindre. J'ai le souvenir de ce grand presbytère que je découvrais à chaque visite de mes grands-parents et parents. Son père Basile et mon grand-père s'étaient en effet partagés pendant de nombreuses années les six classes de l'école communale de Beauvechain. Et cette complicité s'était prolongée après leurs mises à la pension. Une pièce de ce bâtiment avait la particularité de disposer de plusieurs rangées de bandes dessinées, volontiers axées sur l'école de Marcinelle, jugée sans doute moins dérangeantes aux idées catholiques par rapport à l'école de Bruxelles, aux phylactères trop réalistes et trop contemporains. Les héros de JIJE2 y trouvaient manifestement une place préférentielle par rapport à ceux d'HERGE et d'Edgard P. JACOBS. De manière régulière, les familles PARFONRY et PAESMANS se retrouvaient dans ce presbytère. C'est ce qui me permit de découvrir et parcourir avec volupté tous ces témoignages du 9ème art qui restent encore à ce jour l'un des moments les plus créatifs de ma jeunesse. Et en particulier, Les Belles Histoires de l'Oncle Paul 3ces courts récits complets, axés le plus souvent sur des aspects historiques, et qui doivent être à l'origine de mon intérêt pour ce domaine de la science. L'intérêt de cette lecture ne pouvait être finalement qu'un moteur pour les découvertes et les livres. Ce qui ne m'empêchera pas in fine d'avoir une préférence pour l'esprit de plus grande ouverture au monde diffusé dans les aventures de Tintin en négligeant quelque peu les dialogues simples et plus fantaisistes de Spirou et Fantasio, les fers de lance des éditions DUPUIS de Marcinelle. Il est vrai que la présence de toutes ces bandes dessinées, dont l'origine ne m'a toujours pas été expliquée, offrait un contraste avec ce type d'habitation.

    En 1965, Henri rejoindra, avec sa mère, le presbytère de Nil-St-Vincent. Son dynamisme ne fera que croître à partir de ce moment. Il redynamisera pour les hommes la Ligue du Sacré-Coeur et, pour les femmes, la Ligue des Ménagères rurales. Il sera également en charge de deux pastorales, celle de la jeunesse et celle du mariage. Il emmenait les enfants en camp de vacances : deux fois en Autriche avec les filles. Quant aux garçons, ils partaient en vélo dans les Ardennes. Certains en parlent encore de nos jours. Peu après son arrivée à Nil-St-Vincent, je le contactai dans le cadre d'une action spécifique, explicitée ci-après. 

Récemment désigné chef de la patrouille des Antilopes dans l'Unité des scouts d'Auvelais, je me devais d'organiser, ce que l'on appelait à l'époque un " hike ", longue randonnée à pied, en étant capable de suivre un timing et un parcours initialement établi. Pour le coup, j'avais prévu de revenir sur nos terres du Brabant wallon de l'est. A ma demande, Henri me proposa de dormir la première nuit avec ma patrouille dans le local situé sur la Place de l'Eglise de Nil. Le local n'étant pas chauffé, il y eut, durant cette nuit, un froid de canard. Comme on devait se débrouiller avec la seule nourriture contenue dans nos sacs, pas question au petit matin d'aller manger des croissants chez le curé Henri. Dès l'aube, la patrouille se remettait en marche, poursuivant son périple à pied, à travers champs, et à la boussole, jusque Tourinnes-St-Lambert, lieu de notre deuxième nuit. A cet endroit, j'avais également dégoté un abri en demandant conseil auprès de la soeur de ma mère qui y habitait. Marchant, il est vrai, en terrain conquis, j'avais réduit en ce sens, l'hostilité du milieu4. Je ne me souviens plus si ce stratagème avait été perçu par mon chef d'Unité. Ayant mené ma patrouille à bon port et dans les délais, je fus, par la suite, confirmé comme chef de patrouille.

      Henri complètera son action pastorale par des travaux de rénovation de l'église. Un chauffage au mazout par air pulsé sera suivi, six ans plus tard, par le placement, par ses soins, et avec l'aide de jeunes bénévoles, de onze nouveaux vitraux entre 1972 et 1974. Ensuite, grâce à l'aide de généreux donateurs, l'église sera repeinte et de beaux tapis verts seront placés sur les marches du grand autel. Mais son curriculum devait encore évoluer. De 1971 à 2000, il devint Doyen de Walhain, et, même, de 1974 à 1996, Doyen principal pour toute la zone Est du Brabant wallon, résidant toujours à Nil-St-Vincent. En plus, en 1976, il est désigné adjoint d'Henry De RAEDT, vicaire général du Brabant wallon. De 1990 à 1996, il sera également membre de la direction du séminaire diocésain et chargé des stages pastoraux des séminaristes francophones en Brabant wallon. A partir de 1996, ayant la nostalgie du travail en paroisse, il demandera pour redevenir curé de Nil-St-Vincent et Nil-St-Martin. Et c'est à ce poste en 1999 qu'il prendra sa retraite, conservant son environnement et ses habitudes au presbytère de Nil-St-Vincent, où il s'est éteint. Il sera promu Chevalier de l'Ordre de la Couronne le 15 novembre 2000. En 2008, le Père Prosper KANYAMUHANDA, originaire de Mweso dans le Nord-Kivu, le remercie à l'occasion de la célébration de ces 25 ans de sacerdoce, pour l'avoir guidé et soutenu dès son arrivée.

Monsieur le Doyen s'en est allé

   La messe d'enterrement, célébrée ce 2 janvier 2015, réunit non seulement un nombre conséquent de fidèles, mais aussi un parterre de prêtres placés en demi-cercle derrière l'autel. Sous la direction de l'évêque du Brabant wallon Jean-Luc HUDSYN, et du doyen de Walhain, Marcel HAUBEN, une armada de prêtres africains, officiant dans toutes les communes environnantes, consolidaient la géométrie de cet espace. Sans trop savoir pourquoi, cette présence me fit penser au Mémorial Kongolo, érigé près d'ici en souvenir des 20 missionnaires belges exécutés lors des troubles du Congo le 1er janvier 1962 à Kongolo, au Nord du Katanga. La dignité de ces prêtres, pour la plupart congolais, était réelle. Et en leurs noms, le Père KANYAMUHANDA se lança dans un discours largement improvisé duquel ressortait l'appréciation profonde dont bénéficiait le Doyen Henri PAESMANS. Son allusion aux vacances le long de la vallée du Nil, afin de programmer les siennes, restera dans les mémoires. Le Nil étant dans ce cas le petit ruisseau qui traversait le village et qui est resté le seul lieu de villégiature du Doyen durant ses dernières décennies.

     Et parmi tous ces textes préparés et lus, il convient de relever l'éloge appuyé de l'abbé Henri WEBER, ancien aumônier national du Mouvement ouvrier chrétien. Compagnon de route d'Henri PAESMANS, il sera celui qui, en tant que responsable pour l'ouest du Brabant wallon, accompagnera PAESMANS et DE RAEDT pour former l'équipe des Trois Henri qui partait participer chaque vendredi, à Malines, aux réunions du Conseil épiscopal. C'est là qu'Henri PAESMANS montrera sa réelle fonction de dialogue afin de concilier les traditions religieuses de ces villages avec la modernité due à l'arrivée de nouveaux arrivants à partir de 1965, s'installant sur les terres agricoles devenues peu rentables. Allant même par critiquer la rapidité des décisions de Vatican II, qui venaient bousculer des gestes symboliques auxquels les gens des campagnes n'étaient pas préparés.

      De tous ces textes entendus lors de cette messe, ainsi que des commentaires enregistrés à la sortie de l'église, il en ressort indéniablement que le Doyen PAESMANS a marqué de sa présence sa région du Brabant wallon de l'Est. Homme exceptionnel de gentillesse et d'humanité, pour l'un, il avait de l'humour et savait nous faire rire pour un autre. Grand animateur de la communauté, il était toujours à l'écoute et prêt à rendre service. Très grand curé de paroisse, aimé et apprécié,  il avait toujours ce petit sourire qui écoute.  

      Au moment de sa retraite en 1999, il fut toute discrétion. Devenant durant ces quinze années une référence vivante, prête à aider, sans jamais s'imposer, apparaissant même comme un métronome quand il venait prendre son repas de midi dans la famille LANOYE. 

     Sur le plan généalogique, Henri PAESMANS est le fils d'Anna PARFONRY, soeur d'Emile PARFONRY, mon grand-père. Et donc le cousin germain de mon père. Il était le plus jeune des 3 enfants. Au côté d'Edgard, décédé en 2000, vit encore sa soeur Gilberte, âgée de 94 ans. Les familles PAESMANS et PARFONRY ont vécu à Beauvechain, très proches l'une de l'autre, du fait du travail commun d'instituteur à l'école communale. Même si mon grand-père et mon père n'ont jamais été très affectés par ce sentiment religieux, les souvenirs de jeunesse à Beauvechain, d'adolescence, d'exode en 1940, mais aussi les rencontres régulières à Noduwez, de même que les visites fréquentes de mes parents à partir de sa pension, ont créé des liens suffisants pour que les deux familles soient restées si proches. Un témoin de cette époque, Anne-Marie COLLIN, qui fut élevée chez les PAESMANS à Beauvechain, en est aujourd'hui la dernière mémoire. En 2006, c'est en lisant son document de synthèse sur les PARFONRY de Neerheylissem que ce prénom de François-Xavier, né le 3 décembre 1821, est apparu. Ce personnage, inconnu à l'époque, fut à l'origine de nombreuses découvertes et l'un des pions essentiels de développement de cette saga.

    Et pour terminer, je citerai les mots de ma mère lorsque je lui annonçai le décès. En train de jouer aux cartes avec Louis, l'un de ses arrière-petits-enfants, elle déposa son jeu, se leva. Je la senti troublée, se contentant de dire : Henri. Il avait 91 ans. C'était un gentil garçon.

 

1  Sa biographie est principalement une synthèse des documents suivants :

 Interview d'Henri PAESMANS par Renée VANDERHAEGEN pour la revue Pastoralia, 1998 ;

Lettre d'Henri PAESMANS du 20/12/2008 ;

Notice de synthèse rédigée par Henri PAESMANS ;

Homélie rédigée et lue par Henri WEBER à la messe d'enterrement le 2/01/2015 ;

Texte rédigé et lu par Micheline DOSSOGNE à la messe d'enterrement le 2 /01/ 2015 ;

Carnet de condoléances sur l'avis nécrologique inmemoriam.be ;

2 Joseph GILLIN, dit JIJE (1914-1980) : célèbre dessinateur belge de l'école de Marcinelle ; inventa le personnage de Fantasio; auteur des séries : Blondin et Cirage, Jean Valhardy, Jerry Spring, Tanguy et Laverdure ;

3 Comportant plus d'un millier d'histoires publiées entre 1951 et 1969 ;

4 Si je me souviens bien, ce n'était qu'en arrivant dans le village, qu'on devait en principe se mettre à chercher un lieu pour dormir ; C'était une autre époque, on pouvait compter sur les fenils des nombreuses petites fermes et la cigarette ne faisait pas encore partie des risques ;

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21 décembre 2014 7 21 /12 /décembre /2014 18:19

       Récemment retrouvée, la villa de Créteil, construite par François-Xavier PARFONRY en 1860, a déjà été présentée (voir article : La villa flamande de Créteil). Par la découverte, plus récente, des documents en rapport avec la succession, il est relaté que la propriété s'étendait sur 58 ares 96 ca. Outre une maison de jardinier, une écurie, un jardin, un parc boisé, cette propriété s'orchestrait autour d'une  maison d'habitation constituée d'un rez-de-chaussée et de trois étages. Disposant de nombreuses pièces, d'une salle de billard, l'élément le plus innovant relève sans aucun doute dans l'existence d'un calorifère dans les caves, remplaçant le classique foyer de cheminée. François-Xavier, dont la fortune provenait, pour une bonne part, de la production de cheminées en marbre pour les beaux immeubles haussmanniens, n'avait pas reculé devant ce tout nouveau mode de chauffage et de distribution de la chaleur. Témoignage de la modernité, de l'innovation, ayant caractérisé la vie de ce personnage.

      Vendue peu après le décès de son fils Paul, par la veuve de ce dernier, en 1921, cette propriété a subi plusieurs affectations. Achetée par un certain Louis Victor CHEVALLIER, architecte, elle a abouti de nos jours à être occupée par le Carmel Sainte-Thérèse. Ce qui n'a pas été probablement la meilleure initiative pour assurer la persistance des lieux dans son environnement initial. Installé à Natoye en Belgique en 1901, le Carmel avait fui en cela les vicissitudes de la loi française de cette même année1, contraignante pour les congrégations religieuses. Exilée volontairement comme de nombreuses autres pour échapper à une plus grande transparence, ce fut en définitive un exil fiscal vers la Belgique avant la lettre2.  Mais quelle mouche a piqué ce Carmel de revenir s'installer à Créteil en 1920 dans la rue du Moulin ? Pour finalement en arriver à venir squatter en 1949 la propriété de François-Xavier dans l' Avenue de Ceinture. En peu de temps, une bonne partie du jardin et du parc boisé ont fait place à des constructions destinées à la prière et au recueillement, indispensables pour la quiétude de cet Ordre religieux contemplatif. Comme si le calme d'une promenade dans un sous-bois et les odeurs d'un panel de fleurs ne pouvaient pas fournir un résultat similaire. Une chapelle, un cloitre avec son pré carré d'espace vert ont empiété largement sur le domaine initial. 

      Une configuration nouvelle s'appropriait l'espace du domaine. Ce qui ne nous a pas empêché de reformer la même mission exploratoiree que celle menée dans les murs de Paris en août 2013 (voir articles : Paris 1 à 6). Il fut décidé de retenter l'expérience. Les deux Parfonry, fact house, toujours accompagnés de leur conjoint, reçurent en plus l'appui de Françoise, l'ainée, la parisienne. Tous les cinq se mirent à rêver, quelques 95 années après s'en être éloigné, de pénétrer dans l'enceinte cloîtrée de ce lieu. Et l'approche permit de comprendre précisément l'origine de cet adjectif. Plusieurs tentatives s'avérèrent en effet nécessaires avant d'obtenir un rendez-vous avec la Mère Prieure. Qui fit la sourde oreille avant de réagir à la rédaction, par Agnès, d'une lettre rassemblant le maximum d'informations sur l'historique de cette maison. Ce qui eut comme résultat de provoquer le ressac espéré. Agnès reçut, la veille au soir de son départ, un appel téléphonique de la Mère Prieure, lui fixant un rendez-vous au Carmel pour le lundi 15 décembre à 12 heures 30. Il n'y avait plus qu'à obtempérer. L'ouverture divine tant escomptée avait été transmise à temps en empreintant une voie moderne de communication. Oufti, qu'allait-on y découvrir !!!

Plan des nouvelles constructions du Carmel Sainte-Thérèse de Créteil (La villa située à droite, n'est pas reprise sur cette photo)

Plan des nouvelles constructions du Carmel Sainte-Thérèse de Créteil (La villa située à droite, n'est pas reprise sur cette photo)

      La propriété est toujours entourée, semble t-il, de son mur en pierres d'origine. Par son regard perçant de bibliothécaire, habituée à fouiller dans la pénombre des catacombes des archives, Agnès remarqua de suite l'objet qui permettait de faire le lien avec François-Xavier. Encastrées dans la pierre, indissociable de cet endroit, la petite porte d'entrée donnant accès à la villa, est entourée de deux pièces en marbre griotte rouge (de Belgique !!). Etonnantes, ces deux plaques de marbre percées d'un demi-ballon et fixées à ce repaire de nonettes. Probablement jouant un rôle de support à une manette reliée à un câble qui aurait actionné une sonnette3. Le plus remarquable restait cependant à découvrir. Au fond de la partie incurvée, apparaissent encore très lisiblement les lettres P Y. On ne pouvait avoir une meilleure preuve pour attester d'un lien avec le premier locataire du lieu. P Y, deux lettres sans contrefaçon évidemment pour PARFONRY. Plus subtil et plus clairvoyant que la cheminée retrouvée au musée Carnavalet (voir article : La cheminée est toujours au Musée Carnavalet, Paris 2), ce sigle nous était visible, tel la découverte du secret d'une chasse aux trésors. Une sorte de Da Vinci Code qui avait conduit les alter ego du Professeur Robert LANGDON et de la cryptologue Sophie NEVEU à suivre une piste qui les aura au final emmenée à une organisation religieuse. Le Carmel Sainte-Thérèse serait-il, dans ce cas, une sorte de Prieuré de Sion, détenteur d'un secret capable de détruire un dogme !!!. Y a -t-il un mystère qui se cache derrière le mur du Carmel ? A suivre ........

 

Porte d'entrée au 71 Avenue de Ceinture et détail de la plaque de marbre avec l'inscription P Y (credit : Roland PARFONRY)
Porte d'entrée au 71 Avenue de Ceinture et détail de la plaque de marbre avec l'inscription P Y (credit : Roland PARFONRY)

Porte d'entrée au 71 Avenue de Ceinture et détail de la plaque de marbre avec l'inscription P Y (credit : Roland PARFONRY)

1  La loi française de 1901 est une loi fixant le droit des associations et liant la liberté d'enseignement des congrégations religieuses à une plus grande transparence sur les recettes et la nécessité de disposer d'un compte financier annuel ; ce qui provoqua un exode en particulier vers la Belgique ;

2 A l'origine, installé rue de Grenelle à Paris, le Carmel Sainte-Thérèse a accueilli à plusieurs reprises des membres de la famille royale jusque la Révolution ;

3 dixit Patrick, le Mac GYVER familial ;

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9 décembre 2014 2 09 /12 /décembre /2014 10:13

    La Route du Rhum, édition 2014, vient de se terminer ce 3 décembre avec l'arrivée du dernier concurrent. Par sa victoire, en un temps record, Loïc PEYRON a inscrit une nouvelle page de la légende de cette course.

     Le personnage que l'on découvre ci-dessous n'est en rien l'un des concurrents de cette course. Le cadrage, le lieu et la netteté de la photo me semblaient être cependant en lien étroit avec cette aventure maritime moderne. Naviguant dans ses Antilles qu'il connait bien pour y être né, Patrick est un PARFONRY qui ne semble en rien stressé par les déferlantes que l'on retrouvent du côté des Saintes. Kaz la toujou pendan1, pas de galères en perspective, rien que la satisfaction d'être retourné là où sa vie a commencé. Aucun devoir de mémoire à enclencher comme le veut habituellement ce blog. Simplement l'occasion d'un petit clin d'oeil vis à vis de ce chef de bande qui nous apparaît erronément si solitaire. Belle image également du poète qui se cache en lui, du lecteur dont l'esprit des derniers livres abordés, que ce soit :

- Retour à Killybeggs (Sorj CHALANDON), analysant la folie meurtrière de l'IRA en Irlande du Nord,

Quand la lumière décline (Eugen RUGE), relatant l'odyssée étrange d'une famille revenue en RDA,     

Le médecin d'Ispahan (Noah GORDON), faisant découvrir le chemin de la connaissance au contact d'Avicenne,  

- 1Q84 (Haruki MURAKAMI), marchant dans les traces des ornières dévoilées dans le 1984 de Georges ORWELL ; 

peuvent se retrouver dans la phrase de Winston CHURCHILL : Rien n'est plus coûteux que la vengeance.

   Le souci actuel de l'absence de références, de nécessités de devoir recréer de nouveaux modèles, de manque de désir d'apprendre, de réinitier la culture de ses cinq sens n'ont pas de prises sur ce galérien moderne. Un mélange de Mac GYVER, de Jean BART, de Jean-François NICOT, de Philippe LAVIL, de SANTIAGO2 et de Lech WALESA

     Passe ton rhum d'abord, la devise de Paul HIGNARD, ce gamin de Saint-Malo, arrivé à Pointe-à-Pitre, après avoir lutté dans les flots plus de trente jours que le vainqueur, n'est sans doute pas limitée par l'âge. De 7 à 77 ans nous disait-on du temps de nos lectures de TINTIN.

Comme il n'a pas d'argent pour faire le grand voyageur

Il va souvent parler aux habitants de son coeur

Qu'est-ce qu'ils s'racontent, c'est çà qu'il faudrait savoir

Pour avoir comme lui autant d'amour et de regard

Il est libre Pat ! Il est libre Pat !

Y a même qui disent qu'ils l'ont vu voler3

   

      Bon rétablissement Patrick. La photo m'a été transmise par qui tu sais !  J'en ai conclu que j'avais la permission de l'utiliser à bon escient !!  

 

1 Trad. : La maison toujours pimpante (extrait de Maldon, la chanson en créole de Zouk Machine) ;

2 Le pêcheur dans le livre " Le vieil homme et la mer " d'Ernest HEMINGWAY ; 

3 Adaptation de la chanson "Il est libre Max" écrite par Hervé CRISTIANI ;

Un PARF au large des Antilles en avril 2014 (credit : ....)

Un PARF au large des Antilles en avril 2014 (credit : ....)

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6 décembre 2014 6 06 /12 /décembre /2014 16:54

    Cet article se veut emmener le lecteur dans une réflexion inhabituelle mêlant philosophie, géographie et politique. M'écartant des chemins habituellement abordés autour de la découverte d'une histoire basée sur la recherche de la mémoire d'un patronyme. Voulant d'une certaine façon chercher à démontrer que l'étude du passé doit nous servir pour le futur. Et avoir un jardinier pour cultiver les pensées n'est pas à négliger non plus.

     L'histoire atypique qui va être racontée débute de manière assez imprévisible. A la manière d'un petit film d'espionnage, je fus emmené à côtoyer, dans un restaurant de Bruxelles, un certain John GARANG, un jour de l'année 2001

       Petite restauration, organisée, un peu à l'emporte pièce, par la responsable à l'époque de la Direction Générale de la Coopération au Ministère des Affaires Etrangères, S.E. l'Ambassadeur Cristina FUNES-NOPPEN1. Femme de caractère et de conviction, à la longue carrière d'ambassadrice menée sur les traces de son père, elle avait sollicité un petit nombre de ses collaborateurs pour un déjeuner informel avec John GARANG, le leader, à l'époque, de l'Armée de Libération du Sud - Soudan (SPLA), s'opposant au régime islamiste mis en place à Khartoum. 

      Arrivé par mes propres moyens, sans invitation officielle, l'entrée du restaurant, je le compris quelques instants plus tard, était truffée de gardes du corps. A table, même topo. La personne, placée à mes côtés , ne répondant pas à mes questions, devait très certainement appartenir aussi à ce profil. L'ambiance était néanmoins décontractée. Le but du repas était en fait de faire une présentation des différentes lignes budgétaires, allouées par la Belgique aux PVD, mais aussi de montrer que son expertise était encore bien réelle, quarante années après l'indépendance de ses colonies.  Une façon d'appâter celui qui n'était alors qu'un simple chef de guerre, rassemblant des rebelles animistes et chrétiens.  

      Quelques années plus tard, suite aux accords de paix, John GARANG  fut investi vice-président du Soudan le 9 juillet 2005. Poste qu'il n'occupa pas longtemps, périssant dans un accident d'hélicoptère2 le 30 juillet 2005. Autant l'investissement de proximité mené du côté belge que les espoirs de bénéficier de soutiens financiers étaient anéantis. 

     Oubliant quelque peu cette anecdote de rencontre, mes missions en Afrique (Burkina-Faso, Niger, Maroc, Mali, Sénégal, Rép. Dém. du Congo) se poursuivirent encore quelques années. Jusqu'à celle effectuée au Mali en octobre 2006, pour aller visionner un projet financé, via la FAO, par l'une des lignes budgétaires dont j'avais justement fait la promotion devant John GARANG. Et pour m'apercevoir, in fine, que tous les déplacements de la mission étaient encadrés par l'armée malienne, à la demande expresse de la FAO. Il ne m'en fallu pas beaucoup plus pour comprendre que la région n'était plus sous contrôle des autorités. Je revenais en Belgique avec un sentiment d'inquiétude et de positionnement assez négatif sur le futur. Ce fut ma dernière mission officielle en Afrique, décidant par ailleurs d'arrêter ma carrière en décembre  2008.

     Les années suivantes me donnèrent raison, en commençant en septembre 2010, par l'enlèvement des sept otages français dans la cîté minière d'Arlit au Niger puis par le Printemps arabe (Tunisie, Egypte, Lybie) en 2011, par la nécessité par la France, de mettre en place l'Opération Serval au Mali en janvier 2013pour terminer par l'installation au Proche-Orient d'un Etat islamiste hors-la-Loi depuis juin 2014.

    Un bref résumé de dates qui n'est pas sans marquer d'une certaine cohérence, d'une certaine continuité entre elles. Un choc sociétal dont j'avais été un témoin privilégié à une période encore relativement calme. On venait de passer le millénaire et la pensée attribuée à MALRAUX  " Le XXIème siècle sera religieux où ne sera pas " commençait hélas à hanter les discours. Choc des civilisations, guerre des religions, les mots utilisés sonnent cependant faux, si ce n'est à transmettre la peur.

     La raison profonde, que l'on veuille y croire où pas, est bien celle du manque de terres arables, du manque d'eau pour assurer une production alimentaire suffisante. Le réchauffement climatique, combiné à l'accroissement de populations, n'est plus une bombe à retardement. Nous y sommes arrivés. La hausse du prix des céréales importées a fait sauter la soupape de sécurité, déjà fort tendue par un taux de chômage élevé, une corruption généralisée et un népotisme des dirigeants. Nous qui vivons dans l'excès, n'avons pas  encore conscience de l'existence de ces contraintes.  Et comme l'accès à la nourriture est inégale, la résultante, le salut, est dans la migration ou l'utilisation de méthodes violentes. Et la cessation récente des appuis du Programme alimentaire mondial (PAM) ne viendra que renforcer le couloir de la désillusion3.

    Selon certains économistes, l'ultime effet de cette évolution se retrouvera le jour où les mouvements écologiques croiseront leurs discours avec les mouvements sprituels de nature intégristes qui commencent à prospérer dans toutes les religions4. La protection de la nature s'alliant à la protection de l'âme !! Mais pour aboutir à quelles résolutions ?  La démocratie semble en bout de course tout autour de la Méditerranée et au Proche-Orient. Le manque d'accès à l'eau devient criant5. Le droit à l'alimentation est devenu un droit de l'homme assez difficilement réalisable. Comment arriver à solutionner ce tryptique de réalisations alors que l'on s'en remet de nos jours à de simples slogans. La peur est de toute façon mauvaise conseillère pour répondre à ce genre de situation. Le Maroc est jusqu'à présent le seul pays à avoir amorti la crise de régime. L'une des raisons certainement est d'avoir misé, il y a de cela près de 50 ans sur un plan de relance de l'agriculture6. Bien qu'imparfait, il porte ses fruits de stabilité de nos jours. Mais jusque à quand pourra t-il tenir, au vu de sa croissance démographique et des subventions consenties ? Que se passera t-il si ce charmant pays succombe sous les coups des extrêmes ?

     Le problème est certe complexe. Peu de chances que l'écologie devienne une thématique majeure au Moyen - Orient à court et moyen terme. Mon but n'est pas de trouver l'idée géniale qui apporterait la solution. L'objet de cet article est de montrer le processus de réflexion qui s'est développé suite à la rencontre avec John GARANG. De simple ingénieur agronome, le déjeuner-débat m'a conduit à réfléchir sur l'importance de la géopolitique. Le Sud-Soudan est traversé par le Nil blanc et de nombreux affluents venant de la Kagera au Rwanda7. Un pion essentiel de contrôle des eaux sur ce versant du rift africain se prolongeant entre Khartoum et Le Caire. Quant à l'Etat islamique, il se positionne, avec la Plaine de Ninive, entre les terres fertiles du Tigre et de l'Euphrate. Non loin, Israël accapare le Golan syrien pour sécuriser les eaux du Jourdain. Et les conflits latents pour l'eau en Asie centrale ne nous sommes pas encore parvenus. Et pourquoi ne pas voir, dans la détermination de Boko Haram au Nigéria, la stratégie sous-jacente de contrôler les eaux douces du Lac Tchad, jadis l'un des plus grands lacs d'eau douce8. Entre ces cohérences de situations, la réalité est implacable. Puisse qu'il n'y ait pas de continuité dans les dates !!

     En créant l'Etat du Congo, englobant l'entièreté d'un bassin versant d'un fleuve, la Belgique avait, en son temps, montré la voie. Toute l'attention de Cristina FUNES-NOPPEN pour une région, à priori inhospitalière, m'est ainsi apparue comme l'héritière de cette géopolitique.  Devenu indépendant le 9 juillet 2011, John GARANG n'aura pas eu le temps de devenir le premier Président de ce nouveau pays, bénéficiant de conditions favorables pour la production agricole. Aurait-il eu le feeling, avec ce potentiel, de développer un plan de développement de l'agriculture, ce que peu d'Etats ont entrepris en revanche ?

     Augmenter la superficie des surfaces irriguées est donc crucial lorsqu'il s'agit de nourrir l'humanité (in Bruno PARMENTIER : Nourrir l'humanité, préface d'Edgard PISANI, La Découverte, réédition 2009)

   Favoriser l'investissement au niveau des petits producteurs afin de renforcer les circuits courts (in Olivier de SCHUTTER, Rapporteur spécial des Nations-Unies pour le droit à l'alimentation, 2014)

     Mais rien ne vous oblige à penser comme moi ...(expression reprise de Pascal de SUTTER, Pensée incorrecte, Le Vif).

1 Cristina FUNES-NOPPEN : Des hommes, des femmes, et des bêtes, Préface de S.S. le Dalai-Lama, Tome 1 et 2, Ed. Persée ;

2 N'ayant pas été revendiqué, la thèse de l'attentat n'est pas celle qui a été avancée officiellement ;

3 Et à partir de ce constat, on arrive à inscrire l'influence marquante, dans la frange sunnite, de prophéties messianiques appelant à déplacer l'épicentre du monde musulman à Damas en vue de la réalisation de la prophétie du Minaret blanc (descente de Jésus ou Isa dans le pays de Cham), avant d'aller délivrer Jérusalem ;

4 A lire, l'article de Jacques ATTALI : Ecologie et spritualité : La rencontre explosive ; Le Vif - L'Express, n° 45 du 7 novembre 2014 ; Extrait : Lorsque ces forces se rejoindront dans ce que j'ai appelé "le double vert", leur idéologie sera d'une force considérable ;

5 La Guerre des six jours en 1967, entre Israël et les pays arabes, est considérée comme la première guerre de l'eau de l'histoire ;

6 Un million d'ha irrigués, 128 barrages construits à ce jour ;

7 Même s'il ne faut pas minimiser la richesse de son sous-sol,  expliquant la forte implication des Etats-Unis dans la résolution des conflits au niveau de cette région ;

8 Partagé entre quatre pays (Nigéria, Tchad, Niger et Cameroun), ce lac, alimenté par le Chari venant de Centre Afrique, est passé en quelques décennies de 26000 km2 à 1500 km2 ; un projet d'acheminer l'eau de la rivière Ubangui, affluent du Congo, est en discussion depuis de nombreuses années ;

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3 décembre 2014 3 03 /12 /décembre /2014 22:10

      Une petite pépite, en lien avec ce thème central de la découverte de la mémoire sur l'histoire familiale, vient d'apparaître sur le site de vente ebay, en ce mois de décembre.

     Parmi un recueil de 9 thèses ophtalmologiques, présentées entre 1918 et 1930, reliées et publiées par le docteur André HERDELO, on y retrouve la thèse de doctorat en médecine de Jean PARFONRY, petit-fils du marbrier FXP. Présenté en 1928, ce mémoire est intitulé : Traitement chirurgical du strabisme paralytique (112 pages, bibliographie), accompagné d'un envoi de l'auteur signé1.

     Diplômé de la promotion 1924 des Internes en Médecine des Hôpitaux de Paris, le parcours de Jean PARFONRY a déjà été détaillé à plusieurs reprises dans ce blog (voir articles : Jean Parfonry à l'hôpital Lariboisière ; Jean, un oeil de maître ; Jean est cité à l'Ordre de l'Armée). L'importance de ses travaux dans le domaine de l'ophtalmologie a été reconnu. Et on peut penser qu'au vu de la liste des noms des huit autres doctorants, Dr. José P. de CARVALHO, Edward HARTMANN, Gabriel P. SOURDILLE, Dr. Jacques BRUNEAU, Dr. Jean VALDMAN, Paul MICHAUD, Dr. Bernard REVERSE, Gilbert CADILHAC, il n'ait été retenu, dans ce recueil, que ceux qui avaient contribué à valoriser ce domaine de la médecine, en pleine évolution.

  Parmi ces noms, on retrouve ainsi Edward HARTMANN, avec qui Jean PARFONRY collabora en de nombreuses occasions. Et qui fut l'un de ces ophtalmologues estimés et reconnus (voir article : Le cercle des ophtalmologues disparus), notamment en créant le premier centre français de traitements orthoptiques.

      Le recueil de ces 9 thèses est mis en vente directe2, au prix de 149 €, par la librairie La Massenie, située à 11170 Montolieu (Aude), village du Livre et des Arts graphiques. On peut le découvrir à l'adresse suivantehttp://www.befr.ebay.be/itm/9-THESES-OPHTALMOLOGIQUES-1918-1930-RELIEES-ET-DEDICACEES-RARE-/381071357217?pt=FR_GW_Livres_BD_Revues_Livres&hash=item58b99f7521

1 La thèse fut éditée à l'époque par la Librairie Louis Arnette, Paris ;

2 Pour celui où celle qui souhaiterait disposer de ce recueil, il est probable qu'un contact direct avec la librairie La Massenie puisse s'avérer persuasif ;

Thèse de Jean PARFONRY (source : ebay ; credit : Librairie La Massenie - Montolieu)

Thèse de Jean PARFONRY (source : ebay ; credit : Librairie La Massenie - Montolieu)

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25 novembre 2014 2 25 /11 /novembre /2014 16:22

     Sur le site des Collections du Musée d'Orsay (numéro d'inventaire PHO 1996 5564), on y découvre une photo sur papier albuminé (H : 18 cm ; L : 21,5 cm) représentant un revêtement de cheminée en marbre. Au verso, imprimé au tampon et à l'encre noire, il y est mentionné : Marbrerie PARFONRY sculpture, 62 rue Saint-Sabin Paris n° 119 A. La photo est datée vers 1870.

      Une simple photo qui atteste une nouvelle fois que ce marbrier fait bien partie de la liste de ceux qui ont laissé une trace indélébile de leur savoir-faire. Outre cette confirmation, déjà mentionnée à plusieurs reprises dans ce blog, le commentaire attenant nous apporte une information nouvelle, pouvant s'avérer essentielle. Comme tous les objets inclus dans un inventaire de musée, l'origine de cette photo est précisé. On y apprend qu'elle appartenait au départ au Fonds Alphonse GOSSET1. Faisant partie ensuite de la collection d'un certain Serge GOSSET, ce dernier en a fait un don manuelà l'Etat français en 1986. Il s'en suivra en 1996 une inscription sur l'inventaire photographique du Musée d'Orsay3.

Photo d'un revêtement de cheminée du marbrier FX PARFONRY (credit : Musée d'Orsay)

Photo d'un revêtement de cheminée du marbrier FX PARFONRY (credit : Musée d'Orsay)

      Si le sujet de la photo n'apporte en soi que peu de nouveaux éléments d'information, si ce n'est celui de découvrir un nouveau modèle de cheminée, la mention de GOSSET en est tout autre. Ce nom a déjà été mentionné précédemment, en relation avec Paul PARFONRY, le fils du marbrier (voir article : Paul Parfonry, l'artiste peintre).

      Sur une feuille trouvée dans la propriété de Briou du Lude, il était apparu l'une des toiles du peintre, intitulée Une tasse de thé. Et il était justement fait mention que cette peinture était la propriété de la famille GOSSET. Et sur une carte postale, à caractère publicitaire, représentant ce même tableau, et faisant partie de la collection du Museo de Historia de Madrid, on pouvait lire au dos de la carte Cigarettes St Michel, Gosset - Bruxelles (voir article : Une tasse de thé de Paul à Madrid).

     A deux reprises, ce nom GOSSET était donc déjà apparu au travers de l'histoire familiale. Cette nouvelle découverte ne peut que renforcer non seulement le lien mais aussi notre curiosité. La famille GOSSET a bel et bien été en relation avec la famille PARFONRY à une certaine époque.

     Petit rappel de ce qui est connu sur cette relation. L'histoire des GOSSET commence avec Félicien GOSSET (1844, Arbre - 1920, Bruxelles), installé à Spy, avant de créer à Bruxelles en 1885, une usine de fabrication de cigarettes, les marques Saint-Michel et Zéphyr, bien connues de tout belge d'un certain âge4. L'apparition de la localité de Spy n'était pas si anodine en soi, suite à la découverte d'un grand tableau religieux de Paul PARFONRY dans l'église de cette même localité (voir article : Signature authentifiée à Spy). L'histoire récente de cette famille GOSSET, suite à la dilapidation de l'héritage familial dans les années 1990, et la mort de Roger GOSSET en 1991, le petit-fils de Félicien (voir article : Paul Parfonry, l'artiste peintre), nous avait convaincu de la difficulté de retrouver des traces de nos jours permettant de nous expliquer l'origine de cette liaison entre les deux familles.

     Alphonse GOSSET (1835, Reims-1914, Reims), dont il est question ici, est un grand architecte ayant vécu à Reims, auteur de la plupart des monuments de cette ville (Opéra, bâtiments Champagne Pommery, nombreux hôtels particuliers, châteaux,....). Il a constitué une importante documentation rassemblant des photographies réalisées entre 1860 et 1900, dans le but de nourrir sa pratique d'architecte. Rassemblée, cette collection fut bien transmise au Musée d'Orsay en 1986. Il a également collaboré à l'Encyclopédie d'architecture, entre 1882 et 1888, au même titre que d'autres architectes français, tels Charles NORMAND et Paul SEDILLE, que l'on retrouvent en certaines occasions au contact des PARFONRY (voir articles : Paulo, pas si barbouilleur que çà !! ; Le vase du marbrier a bien existé au Palais royal à Bruxelles). Son fils Pol (1881-1953) est devenu également architecte.

     Quel lien peut-il exister entre ces GOSSET de Reims (Alphonse et son fils Pol) et la famille GOSSET (Félicien et son petit-fils Roger) en Belgique ? Qui est ce Serge GOSSET, auteur de la donation au Musée d'Orsay ? Autant de questions à résoudre. 

  1986, l'année de donation du Fonds Alphonse GOSSET, correspond en fait à l'année d'inauguration du Musée d'Orsay, considéré comme le Musée des Arts du XIXème siècle5. Même s'il existerait 11 personnages au nom de Serge GOSSET en France, la solution d'une partie de l'énigme semble avoir été trouvée au-travers de Généanet6. Serge GOSSET serait en fait un lointain cousin de Roger GOSSET. Albert (1878, Spy - 1946, Forest), le grand-père de Serge, et Camille (1887, Bruxelles-1958, Woluwe St Lambert), le père de Roger, sont deux des fils de Félicien, celui qui est à l'origine des cigarettes Saint Michel et Zéphyr.

      Quant au lien pouvant exister entre les GOSSET de Reims et la famille GOSSET en Belgique, rien n'est précisé dans les arbres généalogiques parcourus. Ce qui ne clarifie non plus le lien entre Alphonse et Serge. On ne peut croire qu'il n'y ait aucun lien de parenté pour autoriser ce transfert au Musée d'Orsay. D'autant que l'on identifie une avenue Alphonse GOSSET dans la commune de Dilbeek, près de Bruxelles, en Belgique. Qui est donc cet Alphonse, célèbre architecte de Reims,  par rapport à Félicien, le fondateur des Tabacs GOSSET à Bruxelles ? C'est ce que l'on appelle " tourner en rond " sans pouvoir disposer de la clef pour en sortir. Et donc de ne pouvoir toujours pas mieux comprendre le lien entre les familles GOSSET et PARFONRY. A moins de trouver la mémoire vive qui puisse nous extraire du cercle !!

1 Le Fonds Alphonse GOSSET comprend une importante documentation personnelle constituée de journaux, dessins, notes diverses, d'estampes et de photographies ;

2 PASQUIER Julie (2013): Adaptation constante de l'indexation de l'image à l'ère numérique : le cas de l'agence photographique de la RMN-GP, Mémoire présenté à l'Université de Bordeaux III, IUT Michel Montaigne ;

3  www.musee-orsay.fr/fr/collections/catalogue-des-oeuvres/.... , fiche oeuvre : n°86272 ;

4 Du moins pour ceux qui ont survécu à leurs nocivités (tabac brun sans filtre) ;

5 Le Musée d'Orsay possède la plus importante collection des oeuvres impressionnistes au monde ;

6 Arbre généalogique d'Elise GOSSET ;

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7 novembre 2014 5 07 /11 /novembre /2014 19:57

       Il y eut les peintres de Barbizon, ceux de Pont-Aven mais aussi de Crozant. C'est cependant d'un autre endroit que l'on s'en réfère pour parler de l'apparition de la peinture moderne. En 1869, Claude MONET et Auguste RENOIR transposèrent sur leurs toiles les lumières de l'île de la Grenouillère, au milieu de la Seine, en face de Croissy, localité des Yvelines située à l'ouest de Paris. L'impressionnisme était né. La carotte, principale culture maraîchère de ce coin, ne résista pas à cet envahissement. Le développement du canotage1 et la guinguette La Grenouillère n'étaient pas étrangers à cette frénésie qui fut l'une des caractéristiques de cette période qui suivra la défaite contre la Prusse. L'écrivain Guy de MAUPASSANT fut parmi ceux qui y séjournèrent, y qualifiant d'ailleurs de truculente l'atmosphère autour de La Grenouillère.

    Toute cette animation, cette création artistique ne pouvait qu'attirer ceux qui avaient assez d'argent pour s'extraire des murs de Paris. A Croissy, ils furent nombreux ceux qui résidèrent dans de belles villas construites à partir du Second Empire. Banquiers, professions libérales, écrivains et artistes s'y installèrent. Les grands domaines de l'Ancien Régime2 commencèrent à se morceller pour faire place à de belles demeures bourgeoises. C'est dans ce contexte que l'on retrouve notre marbrier François-Xavier PARFONRY, associé à ce moment aux frères HUVE. Auréolé de ses médailles obtenues aux Expositions Universelles (Philadelphie en 1876, Paris en 1878 et Melbourne en 1880)3, il trouvera l'opportunité de s'extraire des beaux immeubles haussmanniens pour venir côtoyer un nouveau style d'architecture et de loisirs. Ses aptitudes à l'innovation et son esprit d'entreprise ont du l'attirer dans ce nouveau cadre. Les recherches ont permis, à ce jour, de le retrouver à deux reprises en bordure de la Seine.

     Un premier travail fut réalisé à Chatou, juste à côté de Croissy, dans l'Avenue de Brimont. Il s'agit d'une belle villa, livrée le 1er juillet 1881, d'un coût total de 625 100 frs. et pour laquelle les travaux de marbrerie atteindront  8 200 frs. Il y sera fait usage de la Pierre d'Euville et du Banc-royal de Saint-Vaast4. S'agit - il de la villa cossue, qualifiée du Second Empire, reprise ci-dessous ? 

      Un second travail sera effectué dans la maison de campagne construite, vers 1886, par un certain Raoul TOCHE au 15 de la rue Charles Bémont, à Croissy. De style anglo-normand, comme de nombreuses maisons à l'époque, les travaux de marbrerie s'élèveront à un montant de 1500 frs. pour un total de 87 763 frs.pour l'ensemble des travaux5. D'un coût largement moins important que la précédente, la photo ci-dessous de cette maison, nous présente néanmoins une impressionnante demeure qui existe encore de nos jours.

     Ce personnage de Raoul TOCHE (1850-1895) n'était pas un inconnu à l'époque. Auteur dramatique et journaliste, il était l'un des plus populaires auteurs comiques de son temps. Plusieurs de ses opérettes et opéras-comiques, mises notamment en musique par Jacques OFFENBACH, furent à l'affiche des théâtres parisiens (not. Théâtre des Nouveautés) dans les années 1880. Il connut cependant une fin tragique. Endetté, il se tua avec un révolver en 1895. Ce qui le fit tomber rapidement dans l'oubli6contrairement aux autres auteurs dramaturges Victorien SARDOU et Alexandre DUMAS fils. Qui a entendu parler de nos jours de l'une de ces pièces : Madame Mongolon, Le voyage en Suisse, Le Château de Tire-Larigot, Adam et Eve, Le Royaume des femmes, Les femmes nerveuses,....?

1. Villa construite par Raoul TOCHE à Croissy, contenant du marbre de FX PARFONRY (Source : archives.croissy.com).         2. Villa Second Empire située rue de Brimont à Chatou (à vérifier si c'est celle avec du marbre de FX PARFONRY ?) (source : Wikipedia Chatou)
1. Villa construite par Raoul TOCHE à Croissy, contenant du marbre de FX PARFONRY (Source : archives.croissy.com).         2. Villa Second Empire située rue de Brimont à Chatou (à vérifier si c'est celle avec du marbre de FX PARFONRY ?) (source : Wikipedia Chatou)

1. Villa construite par Raoul TOCHE à Croissy, contenant du marbre de FX PARFONRY (Source : archives.croissy.com). 2. Villa Second Empire située rue de Brimont à Chatou (à vérifier si c'est celle avec du marbre de FX PARFONRY ?) (source : Wikipedia Chatou)

      Quel lien peut-on trouver entre Raoul TOCHE et François-Xavier PARFONRY ? Tout simplement le journal Le Gaulois7 dans lequel notre marbrier y insérait régulièrement des publicités. TOCHE y était critique journalistique. Le caractère conservateur et républicain de ce journal, qui avait été banni pendant la Commune, correspondait bien aux idées de notre ancêtre. En outre, le Directeur du journal, Edmond TARBE des SABLONS habita également à Croissy

     Cette énumération des deux maisons pour lesquelles François-Xavier PARFONRY a installé des marbres est probablement incomplète. Et beaucoup d'entre elles ont sans doute disparu de nos jours. Seule, une promenade sur le Chemin des Impressionnistes8 nous permettrait de concrétiser notre émerveillement et approfondir nos connaissances sur notre marbrier. A moins que Les Archives de Croissy, que nous avons contactées sur leur site, puissent nous apporter des éléments de réponse sur l'existence toujours actuelle de ces anciennes demeures.

    Cette recherche nous démontre aussi que François-Xavier a été au contact de ce nouveau monde pictural qui faisait la cassure avec le clasissisme issu de la Renaissance. Si les extérieurs des bords de Seine en étaient imprégnés, il est manifeste que les intérieurs de ces nouvelles demeures s'en avéraient peu perméables, préférant conserver la représentation froide et sculpturale du marbre. Et par souci de cohérence familiale, son fils Paul, est resté longtemps impassible9 à ces nouveaux modes d'expression de la couleur et à l'atmosphère truculente décrite par MAUPASSANT. A t-il eu seulement la curiosité de regarder les panoramas du peintre de Croissy Théophile POILPOT10 qui tendait de faire la transition entre les deux modes d'expression ? Manifestement, les intérieurs opulents des immeubles parisiens lui sont restés plus familiers. Ni François-Xavier, ni Paul ne deviendront des croissillions ou des catoviens11 célèbres, ayant préféré, dès 1860, devenir des cristoliens12 sur les bords de Marne, moins truculent assurément.

     Voici une façon bien concrête d'expliquer le cheminement de la mémoire au travers des générations. La généalogie est bien, dans ce cas, largement dépassée par l'interprétation de la découverte historique !! 

 

1 Le Déjeuner des canotiers d'Auguste RENOIR fut peint en 1880/81 à Chatou ; 

2 Depuis Henri IV, Croissy était devenu un domaine seigneurial ;

3 Sans oublier sa Légion d'Honneur obtenue en 1881 ;

4 Revue générale de l'architecture, 1885, n° 3 ;

5 La construction moderne, 1886, n° 17 ;

6 http://archives.croissy.com/2013/06/raoul-toche-1850-1895-du-rire-au-drame.html ;

7  Le journal Le Gaulois fut racheté en 1929 par Le Figaro ;

8 En particulier les Itinéraires MONET et RENOIR ;

9 Ce n'est qu'assez tard qu'il se mettra à peindre ce nouveau type d'expression (voir article : Enfin une peinture moderne de Paul) 

10  Un tel nom, bien réel, ne peut que servir à  insérer un moment de détente dans le texte ;

11 Un habitant de Croissy est appelé un Croissillion ; un habitant de Chatou un Catovien ;

12 Un habitant de Créteil est appelé un Cristolien ;

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3 novembre 2014 1 03 /11 /novembre /2014 16:40

     La réalité de la bataille contre le virus EBOLA est présente dans les médias. La maladie continue à se propager. La peur de la contamination vers d'autres pays en est la crainte latente.

      A quoi est liée cette peur ? Très certainement, au risque de la voir apparaître dans nos contrées. Même si, cette maladie provoque, là même où elle sévit, beaucoup moins de morts que bien d'autres affections, à commencer par le choléra1. En ajoutant, pour notre part, que les efforts mis en place pour circonscrire l'épidémie peuvent expliquer en partie cette différence. Comme si cette comparaison entre Ebola et Choléra devait nous aider à nous souvenir des antécédents. Les grandes épidémies, ce que l'on appelle pandémie2, semblent sorties de nos mémoires collectives. On n'en parle plus vraiment. Aucune chapelle, ni potale ne semble avoir été édifiée en remerciement d'une guérison du choléra3. Comment peut-on dès lors s'en souvenir ? Qu'en est-il réellement ?4

      Les années 1918-1919 ont vu se développer la grippe espagnole avec ses dizaines de millions de morts. Sans doute la plus importante épidémie de notre Histoire moderne. La censure, mise en place par les vainqueurs de la guerre, en a empêché d'en diffuser les informations dans les journaux, préférant conserver vis à vis des populations les sentiments de vainqueur et de nécessité de reconstruction. Et empêchant dès lors que la mémoire collective s'en accapare. 

     Mais pourquoi donc cette comparaison entre Ebola et Choléra ? Alors qu'il faut remonter au XIXème siècle pour faire état de ce type de pandémie.  Plusieurs d'entre elles  se sont développées en un peu plus d'un demi-siècle avant que Robert KOCH n'identifie le bacille en 1883, limitant sa propagation5. La Belgique n'y a pas échappé. La plus meurtrière, la quatrième, en 1866, a causé la mort de 43 000 personnes en 6 mois dans notre pays.

    Et preuve de ce fléau, notre patronyme y a été lié. Outre Jean Joseph PARFONRY de la branche d'Erezée, déjà apparu sur ce blog (voir article : La plus vieille croix funéraire), une autre famille fut plus gravement atteinte. Un père, l'un de ses fils et l'un de ses beaux-fils sont décédés en cette année 1866, ayant été touchés par cette pandémie de choléra. 

    Il y eut Joseph Lambert PARFONDRY, né à Huy en 1803, et décédé à Havelange le 03/08/1866. Suivront son fils cadet Léonard Joseph PARFONDRY, né à Havelange en 1850, et y est décédé le 30/08/1866, tout comme Joseph Ferdinand LAYS,  le 31/08/1866, époux d'Eléonore PARFONDRY (1831, Havelange -1903, Havelange), fille ainée du premier6.

     Qui sont ces PARFONDRY d'Havelange pour lesquels nous n'avions pas encore porté notre attention ? Leur provenance de la ville de HUY ne semble pas faire de doute. Jean Joseph PARFONDRY, le père de Joseph Lambert y est né en 1757 tout comme son fils en 1803. Décédé à Havelange en 1819, cela donne une indication sur l'année de migration vers Havelange, soit aux environs de 1810. Ils doivent, de ce fait, très probablement être reliés aux PARFONDRY de la branche de Forchies-la-Marche, dont la filiation les fait remonter également à la ville de HUY (voir article : Découverte du lieu de naissance de Mengold PARFONDRY). Et rappelons que cette ville de Huy, la première des villes européennes, reconnues comme ayant reçu en reconnaissance une Charte des Libertés, est située à proximité de cette terre de PARFONDRY, le long de la Meuse (voir articles : La terre de Parfondry a bien existé ; Le site du lieu de Parfondry a bien existé). Nous avons la filiation parfaite permettant de remonter à l'une des origines les plus anciennes de notre patronyme.

  De nos jours, cette branche d'Havelange ne serait plus représentée que par deux personnes de sexe féminin. Et donc malheureusement en extinction. 

     La mémoire est sélective, composée de quelques souvenirs, non sans omettre que l'oubli fait le reste dit-on. Deux éléments pour ne pas se rappeler de notre histoire, de l'évolution de notre société. Ne parlons pas des épidémies trop anciennes de peste dans nos villes au Moyen-âge, résultant des conditions d'hygiène et d'insalubrité. Mais qui connait encore ces cas de choléra, apparus chez nous, il y a moins de deux cents ans ? L'oubli, n'est pas volontaire dans ce cas. Il n'est pas dans le déni de vouloir occulter quelque chose du passé. L'oubli est scolaire, éducatif, sociétal. Un travail sur l'histoire d'un patronyme peut faire resurgir une telle connaissance. Et sans doute aider à comparer les phénomènes, en analysant les résultats du passé pour nous servir pour le futur. Et permettre d'y apporter une réflexion, une réponse et non un repli identitaire sur la peur. Qui se souvient de la lecture du livre Le Hussard sur le toit de Jean GIONO, dans lequel le choléra y apparait comme un symbole ? Dans ce cas, c'est la peur du choléra, la haine qui tue, pas le choléra lui-même. C'est ce que certains appellent l'altruisme rationnel.

     Mais rien ne vous oblige à penser comme moi .... (expression reprise de Pascal de SUTTER, Pensée incorrecte, Le Vif)

1 Jacques ATTALI : Contre Ebola, l'altruisme rationnel ; Le Vif L'Express n°43, 24-30 octobre 2014 ;

2 Pandémie : Epidémie présente sur une large zone géographique, à l'échelle internationale ;

3 Il est vrai qu'il n'y avait que peu de chances de guérison; l'expression "peur bleue" découle de cette épidémie car le malade prenait une couleur bleuâtre ;

4 Il ne sera pas fait allusion dans cet article à la pandémie du SIDA, considérant que cette maladie n'est pas intrinsèquement liée à la pauvreté ;

5 Le choléra est toujours endémique en Afrique de nos jours; le vaccin est assez peu efficace; 

6 Anciennement, dans le langage populaire, le choléra était appelé "trousse galant" du fait qu'il affectait plus spécifiquement les hommes que les femmes ;

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14 octobre 2014 2 14 /10 /octobre /2014 17:58

      On aurait pu intituler cet article Un long dimanche de fiançailles. Mais la photo, reprise ci-dessous, est indéniablement le reflet d'une certaine époque. Et c'est à partir de ce qu'elle exprime que l'on en a choisi l'angle d'interprétation. Même si elle peut se définir comme étant une photo de famille, le caractère qui en ressort est marqué par le positionnement et la personnalité des personnes qui y sont représentées. Ni photo de groupe, montrant des individus en symbiose avec le moment, ni photo souvenir témoignant d'un bref instant de rencontre, elle n'en reste néanmoins expressive et interrogative. On y ressent une certaine ambiance, un lien certain entre les personnages. Ambiance et lien que l'on va chercher à faire apparaitre, à interpréter. Mais surtout, photo d'un autre temps, représentative d'un monde rural, retranché sur ses principes, qui n'avait pas encore rejoint le monde galopant des paillettes et de la citoyenneté. 

    La répartition et le regard des personnages en sont indéniablement les aspects majeurs qui en ressortent. Pas besoin de mots, de phrases pour comprendre que cette photo laisse apparaître la force de caractère, la fierté, l'autorité patriarcale des deux personnes posant à l'avant plan. Dès la première manipulation, on est confronté à ce sentiment de domination transmis par ces deux regards. Ils sont manifestement les personnages sur lesquels se focalisent directement notre attention. Attention qui finalement en arrive à découvrir l'autre sentiment exprimé dans la photo. Hommes et femmes sont isolés, séparés par les marches de l'escalier. Non comme une coïncidence mais assurément comme une volonté de reproduire un modèle de société.

     Qui sont-ils, tous ces personnages ? Trois hommes et cinq femmes renfermés dans leurs devoirs et leurs obéissances. Observons bien la photo avant de les définir.

Tout se trouve dans les regards sur cette photo

    Prise le jour des fiançailles, sur le perron de la maison des parents de la future mariée, à Incourt, la photo se compose de deux groupes de personnes. Ou on n'y retrouve pas vraiment une expression de joies, de satisfactions, d'union. Tout répond indéniablement à certains codes encore en vigueur. 

     A l'avant plan, Jean BERGER (1885-1962), le père de la fiancée, le patriarche à la tête d'une fratrie de six enfants1, le chef d'entreprise en plein essor du développement d'un négoce de grains et d'aliments pour bétail, démarré en  l'année 19272. Un personnage autoritaire, fier, séduisant, joueur en Bourse, bon vivant et entrepreneur. Et qui pour moi, outre le fait qu'il ait été mon parrain, a représenté cette force, cette rudesse et ce caractère taiseux qui marquaient généralement les gens des campagnes habitués aux durs labeurs. 

    Un peu en retrait, Emile PARFONRY (1895-1987), le père du fiancé, l'instituteur à l'aube de sa retraite. Un personnage autoritaire, instruit, défenseur de la fonction publique, cultivant son jardin, colombophile passionné et peu dépensier. Et qui pour moi a représenté cette recherche de connaissances, ce côté strict, ce repli identitaire qui marquaient généralement les nouvelles instances émergeantes dans les villages.

   En somme, rien ne rassemble ces deux grands-pères, ces deux chefs de famille. Deux personnages hiérachisés par une simple photo. L'autorité de l'entrepreneur, main dans la poche, veste ouverte,  prévalait par rapport à l'autorité de l'instituteur, renfermé à l'intérieur de son habit. Tout est résumé dans la pose et les regards qui transpercent au travers du papier de la photo. Le premier se devait de marquer de sa prestance et de son territoire.

      Et derrière, à l'abri du trois-pièces boutonné de l'instituteur, Georges PARFONRY (1920-2006), le fils unique, le fiancé, le futur marié, l'ex réfugié du Gard (voir article : Réfugié dans le Gard), le futur Président associatif (voir article : Georges, le colombophile), mon père. Qui, tout en montrant une déférence aux anciens, n'en affiche néanmoins une certaine désinvolture3. Loin du regard profond et perçant, pour ne pas dire tueur des deux autres personnages, le changement de génération est réel. L'héritier, le gendre envisageait, à ce moment, de ne pas reproduire  l'attitude de ses aînés. 

     Au fond de la photo, sur la dernière marche, compactée dans un espace restreint, un groupe de cinq femmes qui attendent probablement l'accord pour se disloquer, une fois la prise introduite dans le boitier. De gauche à droite, on découvre :

Rosa HENNE (1895-1956), la belle-soeur de Jean BERGER, épouse de Georges BERGER (1895-1970), appelée tante Rosa d'Orbais ;

Marthe HUYNEN, épouse d'Adolphe BERGER (1917-2000), le frère de Solange, et donc future belle-soeur, celle qui est à la base de la rencontre dans un bal à Tirlemont, entre les deux fiancés du jour ;

Marthe BERGER (1920-1978), fille de Fernand BERGER (1892-1958), le frère de Jean BERGER ;

Solange BERGER, née en 1924, la petite fiancée du jour, ma mère ;

Julienne LANCELLE (1892-1984), épouse d'Emile PARFONRY, mère de Georges, ma marraine ;

    Une absente remarquée, Maria DELEUSE (1886-1961), la mère de la fiancée, l'épouse du personnage à l'avant-plan. Comme pour bien signifier que c'est sur lui que se focalise l'image de la famille. Pour preuve, au moment de me choisir un parrain, on aurait pu se reposer sur un des trois frères aînés de Solange. Mais, cette éventualité n'était pas encore envisageable, en cela confirmé par un choix similaire pour ma marraine. A bien regarder, même dans ce groupe de femmes, on peut y trouver une hiérarchie. La petite fiancée, celle qui aurait du se retrouver à l'avant-plan, auprès de son futur époux, afin d' authentifier pour les générations futures l'instant, est reléguée à l'arrière-plan aux côtés de sa belle-soeur. Le léger sourire qui l'anime est cependant comme le miroir de celui affiché par son fiancé. Une façon de représenter la joie qui les réunit au milieu de tous ces regards figés et peu accueillants, façonnés par la position sociale. Manifestement, si l'on ne m'avait pas donné d'explications sur le sujet de cette photo, rien ne laissait présager que l'on assistait à l'une des premières rencontres entre les deux familles BERGER et PARFONRY4.

     Quant à préciser le moment, on ne peut que s'en référer à la date du mariage qui suivra (24 mai 1947) (voir article : Le mariage de Georges et Solange) et à l'habillement : probablement début du printemps 1947 ?

    Il m'a fallu, il est vrai, un certain temps avant de décrypter les attitudes et faire revivre le moment au travers de sa date de prise de vue. N'ayant entrevu pendant longtemps que la présence de mes deux grands-pères et de mon père, rassemblés dans un instant unique, l'analyse des attitudes, des regards, la ségrégation n'étaient pas ce qui m'avait apostrophé. Tout cela m'est apparu après n'avoir retenu que quelques dizaines de photos5 parmi toutes celles qui s'aggloméraient dans des boîtes en fer. La multitude avait supprimé la finesse de la description6. Par ce tri, considéré au départ comme un peu aléatoire, il n'avait en fait été conservé que les photos les plus marquantes, celles que mon regard avait perçu et connecté aux neurones. L'expressivité, l'esthétique et l'instantané avaient servi à nourrir mes filtres. Et en dernière analyse, de donner une fenêtre pour me faire comprendre, d'une certaine façon, l'une des raisons de mon choix de carrière à l'étranger. Etait-il envisageable de vouloir fuir ces regards, cette autorité, cet esprit dominateur ? Poser la question c'est probablement et partiellement y donner une réponse !!7

Sans compter les deux premiers fils morts en bas-âge ;

2 Le Plan Marshall, instauré après la guerre 1940-1945, avait mis l'une de ses priorités sur le développement de l'agriculture ;

3 Agnès PARFONRY lui voit " un petit air détaché et coquin " ;

4 Rencontre qui n'a pas du se réaliser souvent, selon mes propres connaissances ;

5 Choix effectué afin de présenter, sur un panneau, un éventail de photos à l'occasion de la journée organisée, en mai 2014, pour fêter les 90 ans de ma maman, la petite fiancée de la photo ;

6 La photo originale étant assez petite, c'est après l'avoir scannée et aggrandie que les détails au niveau de l'expressivité des personnages sont apparus ;

7 L'autre partie de la réponse à la question est explicitée dans l'article : Les dictionnaires du grand-père

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Présentation

  • : Le blog de PARFONRY
  • : Le cadre directeur de ce blog consiste à réunir ce qui peut être transmis sur un patronyme. La présentation de tous ces personnages n'est finalement qu'une manière de transférer un patronyme. Qu'il soit culturel, social ou historique, ce patronyme ne fait que proposer un film dans lequel les séquences sont des instants de vie. L'environnement, le vécu de chacun a probablement plus d'impact sur ce que nous ressentons. Les gênes se diluent plus vite que le lien avec le mode de vie et les rencontres. Cette vision oblige à élargir le champs d'investigation en déviant de l'aspect purement généalogique. La découverte de nouveaux indices motive et assimile parfois cette recherche à une enquête. L'histoire ne peut être racontée de manière linéaire. Chaque élément, chaque personnage a droit à son histoire dans le récit tout en suivant le dénivelé et les courbes imposés par les aléas de l'Histoire et de la vie. Contrairement au patrimoine, un patronyme se voit contraint de s'adapter aux vicissitudes des évolutions sociales et des guerres. Le contenu des quelques 350 articles de ce blog a été rassemblé dans un livre intitulé "La véritable saga des PARFONRY de Neerheylissem - L'histoire d'un toponyme devenu un patronyme ".
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