A l'occasion de l'Exposition universelle de Paris en 1900, de nombreuses manifestations furent organisées en parallèle. Il avait déjà été mentionné1 que Paul PARFONRY avait apporté sa collaboration bénévole à Georges CAIN, le Conservateur du Musée Carnavalet, pour l'organisation de l'Exposition rétrospective de la ville de Paris, sorte de Carnavalet improvisé, en recrutant dans les collections particulières, comme l'écrivait un critique littéraire2 à l'époque.
L'extrait suivant relate l'affection de Paul pour la recherche d'objets encombrants qui devaient remplir les belles maisons haussmaniennes de cette période.
Dans ce demi-jour d'élégance, où cent trente peintures entourent une vingtaine de bustes, on dirait d'un Salon d'autrefois, contemporain d'un de ces intérieurs opulents que M. Walter Gay3 signe de sa maitrise, entre les bibelots anciens collectionnés par Parfonry .... (Le Bulletin de l'Art ancien et moderne, suppl. hebdo, p. 79. Expo et Concours. Cercle de l'Union artistique, Paris, 1912) ;
On y retrouve également cette notion d' intérieurs opulents qui est celle qui a servi à caractériser son style de peinture et dont l'emploi fait encore partie de nos jours du langage usuel et familier permettant de l'identifier.
De son côte, son épouse, née Gabrielle BARBAUT, ne fut pas en reste. On la retrouve comme donatrice d'habits pour une autre exposition intitulée Le costume et ses accessoires4. Si Paul assumait sa passion de peintre en squattant, on l'imagine, l'une ou l'autre pièce de la villa de Créteil ou de l'hôtel particulier de la rue Jouffroy, Gabrielle devait avoir aussi accumulé pas mal de choses en utilisant d'autres espaces. Les encombrants, comme on les appelle de nos jours, avaient largement leur place dans les maisons héritées de François-Xavier, le marbrier.
Un certain nombre d'habits sont fournis pour cette exposition. Les photos reprises dans le document attestent que Gabrielle a fait une donation d'un costume et de deux robes, essentiellement de l'époque Louis XVI. Cette présence d'habits à cette exposition nous apporte l'éclairage nécessaire pour comprendre l'extrait de phrase découvert précédemment et n'ayant pas ou peu de liens avec l'occupation artistique de Paul. Le commentaire formulé dans un journal de l'époque faisait bien référence aux costumes Louis XVI de Gabrielle et non à une toile de Paul.
Parfonry fait partie des collectionneurs qui ont contribué à ce musée des élégances desséchées (Le Figaro du 16 juillet 1900) ;
Description peu flatteuse en apparence, la signification d'élégances desséchées doit cependant être comprise, non pas nécessairement comme l'expression d'une accumulation d'objets démodés mais plutôt, selon le dictionnaire Larousse, dans le sens d'une présentation manquant de douceur, d'ampleur et d'ornements voire d' un coloris qui manque de douceur, de moelleux. De fait, comme on pouvait le craindre, cette exposition rassemblait une panoplie d'objets, de bibelots, sortis des armoires et des placards et ramenés en vue de les aérer. Objets qui pour certains, doivent se retrouver encore de nos jours au Musée Carnavalet à Paris, l'endroit idéal pour se faire une idée du monde des intérieurs opulents de l'époque 1900.
Qu'elle était l'origine de ces habits Louis XVI, le roi guillotiné en 1793, il y avait de cela plus d'un siècle ? Probablement apportés par Gabrielle dans sa dot5 car il est peu évident que François-Xavier, issu d'une famille peu fortunée et belge de surcoit, n'ait amené ce genre de décor royal avec lui. Peu d'éléments sur l'ascendance de Gabrielle BARBAUT n'ont été relevés dans les arbres généalogiques consultés6. Ce qui nous limite pour en donner une interprétation pour le moment. Y avait-il dans la présence de ces habits Louis XVI l'affichage d'un soutien à la monarchie de l'Ancien régime ? Peut - on encore trouver réponse à cette question aujourd'hui ? Décédée en 1958, à l'âge de 88 ans, Gabrielle a peut être laissé des souvenirs dans les mémoires.
Dans un autre genre, imaginez-vous maintenant que le parolier de Johnny HALLYDAY ait eu connaissance de cette expression qualifiant les vêtements de Gabrielle. On aurait pu avoir une toute autre version de la terrible phrase du refrain de la chanson Gabrielle, qui se terminerait en un bel alexandrin parfait7:
J'ai refusé, mourir d'élégances desséchées
P.S : Ah que coucou, répondrait Johnny !!!! 8
1 NORMAND Charles (1900) : Bulletin de la Société des Amis des Monuments parisiens, vol. 12, Paris, p. 321 ;
2 Ad. BRISSON ;
3 Walter GAY (1856-1937) : peintre américain, installé en France en 1876 , réalisant des tableaux du même style de peinture que Paul PARFONRY ;
4 CAIN Georges, CAIN Henri, CLARETIE Jules, etc.... : Musée rétrospectif des classes 85 et 86. Le costume et ses accessoires - rapports, pp. 53 et 55 ; (disponible au CNAM) ;
5 La dot apportée par Gabrielle BARBAUT, selon l'acte de liquidation et de partage des biens, était d'ailleurs beaucoup plus importante que celle de Paul ;
6 Achille BARBAUT, né en 1881 à Isbergues (Pas-de-Calais), décédé le 29/12/1914 à Ypres (Belgique) est le seul personnage relevé portant l'un des prénoms du père de Gabrielle, décédé en 1902 ;
7 C'est à dire formé de deux hemistiches de 6 syllabes ;
8 Extrapolation libre d'un sketch des Guignols de l'nfo ;